L’ambassadeur d’Iran à Paris, Mahdi Miraboutalebi, assure que le programme nucléaire de son pays est civil et non militaire. Et il met en garde la France contre toute ingérence.
Au lendemain du nouveau défi lancé à la communauté internationale par le président iranien Mahmoud Ahmadinejad, qui veut poursuivre son programme nucléaire controversé, l’ambassadeur d’Iran en France dénonce la « stratégie d’iranophobie » de ceux qui veulent la guerre avec son pays.
Comment relancer le dialogue avec l’Iran après l’annonce par le président Ahmadinejad de la construction de dix nouvelles usines d’enrichissement d’uranium ?
Mahdi Miraboutalebi. Quel dialogue ? Les discussions que nous avons eues le 1 e r octobre à Genève n’avaient rien à voir avec le nucléaire car, pour nous, la question nucléaire est finie.
Même si nous avons rappelé à cette occasion la nécessité pour tous les pays de bénéficier de la technologie nucléaire et la nécessité d’éliminer les armes nucléaires dans le monde.
Mais les Occidentaux sont inquiets devant le programme nucléaire iranien...
Les pays qui se disent inquiets et veulent mettre l’Iran au banc des accusés se trouvent être ceux qui n’ont jamais respecté depuis quarante ans le TNP (traité de non-prolifération) et les règlements internationaux, et ont été au contraire les premiers à violer leurs engagements. Loin de détruire leurs arsenaux nucléaires, ils sont en train de les moderniser. Les Etats-Unis et la France ont été les premiers à ne pas respecter le TNP et à aider le régime sioniste à se doter de la bombe. Tous ces pays doivent aujourd’hui se rendre compte que l’époque du colonialisme est révolue.
Enrichir l’uranium à 20 %, comme menace de le faire l’Iran, n’est-ce pas passer au nucléaire militaire ?
Nous avons écrit il y a quatre mois à l’Agence internationale pour l’énergie atomique (AIEA) car nous avons besoin de combustible pour notre réacteur nucléaire de recherche médicale et nous sommes prêts à l’acheter à qui nous le vendra. Mais si personne n’accepte de nous en vendre, alors nous le produirons certainement nous-mêmes, puisque nous avons déjà le savoir-faire. En attendant, nous poursuivons sous la surveillance de l’AIEA nos activités nucléaires civiles, qui sont totalement pacifiques. Sous le contrôle de l’agence, il est impossible d’avoir d’autres activités nucléaires.
L’Iran peut-il rompre demain avec l’AIEA et fermer ses sites aux inspecteurs ?
Nous ne le voulons pas. Tant que l’agence existe, nous continuerons de collaborer avec elle. Mais il faut que tous les pays respectent sa réglementation et que les Occidentaux ne transforment pas l’agence en un instrument de leur objectif politique. Or, l’agence est devenue l’otage d’un petit nombre de pays qui estiment représenter la communauté internationale.
Pourquoi l’Iran n’a-t-il pas saisi la main tendue du président Barack Obama ?
Si ce geste était vraiment sincère, nous aurions déjà serré cette main à de multiples reprises... Mais il ne faut pas créditer le président Obama de ce qu’il n’a jamais fait. Quel acte concret a-t-il fait pour mériter le Nobel de la paix ? Avoir soutenu de manière inconditionnelle Israël et l’agression de la bande de Gaza ? Avoir décidé de nouvelles sanctions économiques contre l’Iran ? Envoyer de nouveaux soldats en Afghanistan et bombarder les populations civiles ?
« Il n’est pas tolérable que les Iraniens se dotent de la bombe atomique », répètent Nicolas Sarkozy et Bernard Kouchner en dénonçant l’entêtement des autorités de Téhéran...
Cela fait dix ans que certains prétendent que l’Iran cherche à se doter de la bombe atomique, mais c’est un mensonge énorme que les faits ont prouvé. L’arme nucléaire est contraire à toutes nos convictions religieuses et n’a aucune place dans notre stratégie de défense. C’est pourquoi je dénonce la stratégie d’iranophobie de tous ceux qui avec l’aide du sionisme veulent la guerre.
Craignez-vous un raid américain ou israélien contre les installations nucléaires iraniennes ?
Les menaces de guerre et de bombardement, cela ne marche plus !
Clotilde Reiss est toujours retenue en Iran... Comment résoudre ce problème ?
Posez la question au juge d’instruction en charge du dossier. En parler sans arrêt, à quoi cela va-t-il servir ? Peut-être vaudrait-il mieux laisser le cours judiciaire suivre son chemin...
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samedi 5 décembre 2009
« La bombe atomique est contraire à nos convictions religieuses »
Accident pour Damas, attentat selon Téhéran
moyen-orient . Une explosion a détruit un bus iranien, hier, en Syrie. Pour le régime, le coupable est un pneu.
Par JEAN-PIERRE PERRIN
Qui faut-il croire ? La version officielle syrienne qui affirme que la mystérieuse explosion d’un autobus iranien survenue hier à Damas est due à l’éclatement… d’un pneu ? Ou Téhéran, dont la télévision d’Etat, via son correspondant, a jugé qu’elle avait été «probablement causée par une bombe posée sous le véhicule» ? Accident ou attentat, l’explosion a fait au moins trois morts, dont un enfant, selon la Syrie. Mais le bilan pourrait être plus élevé : celui donné hier soir par Debka, site proche des services de sécurité israéliens faisait état - ce qui est sans doute très exagéré - de dizaines de morts. Coïncidence ou non, cette explosion est intervenue alors que le secrétaire du Conseil suprême de la sécurité nationale iranien, qui est aussi le principal négociateur du régime de Téhéran sur le nucléaire, Saïd Jalili, se trouvait à Damas pour une visite officielle à l’allié stratégique syrien, lors de laquelle il a rencontré le président Bachar al-Assad.
Pour le ministre syrien de l’Intérieur, Saïd Sammour, il ne s’agit que d’un accident. «Le pneu a explosé car il y avait trop de pression», a-t-il dit. Reste à expliquer l’extrême violence de l’explosion qui, selon les images, a déchiqueté le véhicule. Le souffle a projeté des débris à une dizaine de mètres alentour. Cité par l’AFP, Mohammad Issa, directeur de l’hôpital Khomeiny situé dans ce même quartier, a indiqué que les cadavres étaient «en lambeaux».
Le bus, qui avait acheminé des pèlerins iraniens dans la capitale syrienne, aurait été vide au moment de l’explosion. Celle-ci n’est pas sans rappeler l’attentat à la voiture piégée qui, le 27 septembre 2008, avait fait 17 morts près de ce quartier qui abrite le principal mausolée chiite de la capitale. Le siège des services de sécurité syriens est situé à proximité. Le précédent attentat avait visé un officier supérieur.
S’il s’agit d’un nouvel attentat, ce qui apparaît une évidence, qui l’a organisé ? Le précédent avait été imputé par Damas à un groupe lié à Al-Qaeda. Est-ce encore le cas ? Après l’assassinat - par les Israéliens - d’Imad Moughnieh, le chef militaire du Hezbollah, tué dans l’explosion de sa voiture l’an dernier, puis celui du général Mohammed Souleimane, l’homme chargé du dossier nucléaire syrien, cette nouvelle attaque ébranle l’image de stabilité que voudrait donner le régime de Damas.
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jeudi 3 décembre 2009
La surenchère iranienne dans le dossier nucléaire aggrave les risques de crise
L'Iran a franchi une nouvelle étape dans la provocation envers la communauté internationale en annonçant, dimanche 29 novembre, qu'il se doterait de dix nouveaux sites d'enrichissement d'uranium. Soulevant une large indignation dans les pays occidentaux, cette décision de démultiplier son programme nucléaire prend de front la diplomatie de M. Obama et va à l'encontre des demandes du Conseil de sécurité de l'ONU, qui exige depuis 2006 la suspension de cette activité.
L'Iran a, en outre, fait dimanche une deuxième annonce, susceptible d'aggraver considérablement la crise diplomatique autour de ses activités sensibles. Il envisage de produire de l'uranium enrichi à 20 %, ce qui constituerait une fuite en avant technologique. Jusqu'ici, officiellement, l'Iran n'a jamais dépassé le niveau de 4,8 %. Le seuil de 20 % représente, selon les normes internationales, la limite entre le nucléaire civil et le nucléaire à caractère militaire.
RÉPLIQUES À L'AIEA
Ces deux annonces ont été faites à l'issue d'une réunion du gouvernement iranien à laquelle participait le président Mahmoud Ahmadinejad. Elles ont été présentées comme des répliques à un vote intervenu deux jours plus tôt, à l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), condamnant l'Iran pour ses actes de dissimulation après la révélation en septembre d'un site secret d'enrichissement, près de Qom.
Selon M. Ahmadinejad, l'objectif est de parvenir à une capacité permettant de "produire 20 000 mégawatts". Les Etats-Unis ont réagi en déclarant que l'Iran risquait un plus grand isolement.
Ouvrant la voie à une expansion considérable du programme atomique, le gouvernement iranien a ordonné dimanche la construction de cinq nouvelles usines d'enrichissement d'uranium à des emplacements déjà mis à l'étude. Il a aussi demandé que, dans un délai de deux mois, cinq autres sites soient identifiés.
L'Iran ayant aujourd'hui deux sites d'enrichissement déclarés (Natanz et Qom), cela multiplierait par six le nombre d'installations. Il a été annoncé que les futurs sites devraient tous avoir les mêmes dimensions que l'usine de Natanz, qui est destinée à recevoir 50 000 centrifugeuses.
C'est à Natanz, site longtemps resté clandestin avant d'être révélé en 2002 par un groupe d'opposants iraniens exilés, qu'ont été accumulés depuis 2006 les quelque 1 500 kilos d'uranium faiblement enrichi dont l'administration Obama a essayé en vain d'obtenir l'évacuation (à hauteur de 1 200 kilos) vers la Russie et la France, pour tenter de désamorcer les tensions autour du nucléaire iranien.
Ce schéma de circuit d'uranium, conçu durant l'été par les Etats-Unis puis endossé par l'AIEA, visait au départ à répondre à une demande iranienne transmise en juin à l'Agence de Vienne. L'Iran demandait en effet d'être fourni en uranium enrichi à 20 % pour un réacteur de recherches à Téhéran, utilisé à des fins médicales.
Les diplomates occidentaux anticipaient qu'en cas de refus de l'AIEA, l'Iran prétendrait avoir en conséquence le droit de pousser lui-même son niveau d'enrichissement à 20 %. C'est ce qui s'est produit dimanche. "Nous allons étudier la possibilité de produire de l'uranium enrichi à 20 % lors de la réunion du gouvernement mercredi", a annoncé M. Ahmadinejad.
Aucune précision n'a été fournie quant à l'emplacement des dix nouveaux sites envisagés. Selon le président iranien, l'Iran a "besoin de 500 000 centrifugeuses" (appareils permettant l'enrichissement) semblables à celles de Natanz, mais M. Ahmadinejad a aussi évoqué une possible utilisation d'appareils plus sophistiqués, qui permettrait d'enrichir l'uranium à plus grande vitesse.
L'échec de l'offre d'enrichissement d'uranium iranien à l'étranger, faite par les grandes puissances en octobre, a coïncidé avec la poursuite de tensions politiques internes en Iran, où la surenchère entre les factions semble avoir réduit à néant l'espoir d'un compromis diplomatique, caressé depuis le début de l'année par l'administration Obama.
FRONT DIPLOMATIQUE COMMUN
Celle-ci n'a pas remis en cause, dimanche, son intention de se donner jusqu'à la fin de l'année pour mesurer les résultats de sa politique de la main tendue, mais elle ne cache plus son agacement. Si l'Iran met ses nouveaux plans à exécution, cela constituera "un exemple supplémentaire de la façon dont [ce pays] choisit de s'isoler", ont réagi dimanche les Etats-Unis, ajoutant que "le temps commence à manquer" pour que Téhéran fasse un geste constructif. Washington a intensifié ses efforts auprès de la Russie et de la Chine pour former un front diplomatique commun contre Téhéran.
Le récent vote d'une résolution du Conseil des gouverneurs de l'AIEA, une première depuis 2006, a été facilité par cet effort américain de multilatéralisme. L'Iran semble avoir été pris de court par ce texte, qui l'appelle notamment à cesser immédiatement les travaux sur le site de Qom. Il envisage désormais, comme il l'avait déjà fait en 2006, de limiter sa coopération avec l'AIEA. Mais celle-ci est déjà réduite à la portion congrue, ainsi que l'a reconnu le directeur de l'Agence, Mohamed ElBaradei.
'Iran ira-t-il jusqu'à la rupture totale avec l'Agence, suivant ainsi l'exemple de la Corée du Nord qui avait expulsé les inspecteurs internationaux et annoncé, en 2003, son retrait du traité de non prolifération (TNP) ? Cette question est désormais posée.
Pour l'heure, le Parlement iranien, ainsi que l'a annoncé dimanche son président Ali Larijani, "est prêt à reconsidérer le niveau de coopération avec l'AIEA, si l'Occident continue d'exercer des pressions sur nous". Samedi, 226 députés iraniens sur 290 ont signé une trêve allant dans ce sens.
Natalie Nougayrède
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Retour des tensions avec l’Iran
Téhéran annonce la construction d’usines d’enrichissement d’uranium mais n’écarte pas l’option diplomatique. La communauté internationale, inquiète, s’impatiente.
En annonçant, dimanche, qu’il projetait de construire dix nouvelles usines d’enrichissement d’uranium et de produire de l’uranium enrichi à 20 %, l’Iran a bien évidemment suscité de nouvelles inquiétudes au sein de la communauté internationale. D’autant que la nouvelle survient après une résolution adoptée vendredi par l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) condamnant Téhéran sur son programme nucléaire controversé. Le chef de l’Agence iranienne de l’énergie atomique, Ali Akbar Salehi, a d’ailleurs indiqué sans ambages que cette décision était « une réponse ferme à la mesure scandaleuse du groupe 5 + 1 » (les membres du Conseil de sécurité plus l’Allemagne – NDLR). Il y a quelques semaines, pourtant, la proposition de l’AIEA et les réactions mesurées de l’Iran avaient soulevé quelques espoirs. L’offre visait à échanger son uranium faiblement enrichi (3,5 %) contre du combustible nucléaire (uranium enrichi à 20 %). Mais l’Iran veut plus de garanties et a demandé un échange simultané sur son territoire, ce que l’AIEA a refusé. Les communications sont donc de plus en plus brouillées. Si, pour l’heure, personne ne semble rechercher la rupture, le regain de tensions pourrait être exploité par certains pays qui, en jetant de l’huile sur le feu, détournent l’attention internationale de leur propre dossier.
Reste à savoir ce que cherche l’Iran, qui souffle le chaud et le froid, semble s’ouvrir avant de se refermer, et multiplie les déclarations contradictoires. Ainsi, malgré l’annonce de la construction de nouvelles usines, le président du Parlement iranien, Ali Larijani, explique : « Je pense qu’il existe encore une opportunité diplomatique et il est dans leur intérêt (aux Occidentaux – NDLR) de l’utiliser. » Il est vrai que la situation politique et économique de l’Iran est loin d’être stable. Au Parlement, 226 députés sur 290 ont cosigné une lettre réclamant au gouvernement « un plan rapide visant à réduire le niveau de coopération avec l’Agence internationale de l’énergie atomique ».
D’autre part, l’opposition entend faire, du 7 décembre, une grande journée de manifestation. Enfin, on vient d’apprendre que l’État contrôle désormais moins de 50 % de l’économie iranienne. La Maison-Blanche a prévenu que « le temps presse pour que l’Iran réponde aux inquiétudes grandissantes (…) sur son programme nucléaire ». Paris juge « très dangereux » que l’Iran « s’entête à ignorer les demandes » de l’AIEA.
Pierre Barbancey
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