samedi 27 septembre 2008

McCain et Obama sur l'Iran, la Russie et la sécurité des Etats-Unis

Question : J'ai une mauvaise et une bonne nouvelle. Votre temps de parole est jusqu'à présent égal, ce qui est remarquable. Mais la mauvaise nouvelle, c'est que mes 5 minutes sont dépassées. Nouvelle question. Quelle est votre interprétation de la menace que représente l'Iran pour la sécurité des Etats-Unis ?

John McCain : Mon interprétation de la menace que représente l'Iran pour les Etats-Unis est que si l'Iran acquiert l'arme nucléaire, il s'agit d'une menace existentielle à l'encontre de l'Etat d'Israël. Et c'est une menace à l'encontre de la région parce que les autres Etats de la région vont également ressentir le besoin d'acquérir l'arme nucléaire. Nous ne pouvons pas permettre un deuxième Holocauste. Et ça ça doit être très clair. Cela fait longtemps que je propose – et j'en ai parlé à des dirigeants étrangers – la constitution d'une ligue de démocratie. Soyons clair : les Russes préparent des actions importantes au Conseil de sécurité des Nations unies. Je propose la constitution d'une ligue de démocratie, un groupe de gens, un groupe de pays qui partagent des intérêts, des valeurs, des idéaux communs. Et qui contrôle aussi une grande partie du pouvoir économique mondial. Nous pourrions imposer des sanctions importantes et douloureuses à l'Iran, ce qui aurait un effet bénéfique. Les Iraniens ont un gouvernement pourri. Par conséquent, leur économie est en mauvais état bien qu'ils aient des recettes pétrolières importantes. C'est pourquoi, je suis convaincu qu'avec les Français, avec les Britanniques, avec les Allemands, et avec d'autres pays, les démocraties de ce monde, nous pouvons exercer une influence sur le comportement des Iraniens. Mais soyez-en sûr, les Iraniens sont en train de s'acheminer vers l'acquisition de l'arme nucléaire au moment même où nous parlons ce soir. Et c'est une menace non seulement pour la région mais pour le monde entier. Je voudrais également faire remarquer que les Iraniens sont en train de placer des engins explosifs les plus meurtriers en Irak qui tuent des jeunes Américains. Il s'agit de groupes spéciaux en Iran qui se rendent en Irak et qui sont formés en Iran. Il y a les gardes républicains en Iran et le sénateur Kyl a présenté un amendement pour les désigner comme responsables du terrorisme, et le sénateur Obama a déclaré que ce serait provocateur. Il s'agit là d'une menace grave pour la sécurité dans le monde, je pense que nous pouvons agir et agir avec nos amis et alliés aussi rapidement que possible. En tout cas, n'ayez aucun doute sur ce sujet, les Iraniens sont en train d'acquérir l'arme nucléaire.

Barack Obama : Je voudrais dire quelque chose clairement. Je crois que les gardes républicains iraniens sont une organisation terroriste. Et je l'ai toujours dit. Ce à quoi fait référence le sénateur McCain, c'est à une mesure prise au Sénat qui modifierait le mandat en Irak afin de traiter du problème iranien. Et de manière ironique, au cours des dernières années, l'élément qui a vraiment renforcé l'Iran, ça a été la guerre en Irak. L'Irak était un ennemi de l'Iran. Et ce n'est plus le cas. Et au cours des dernières années, nous avons vu l'accroissement de l'influence iranienne. Ils ont financé le Hezbollah, le Hamas, ils sont passés de zéro à 400 centrifugeuse afin de mettre au point leur arme nucléaire. Donc, de toute évidence, notre politique des huit dernières années n'a pas fonctionné. Le sénateur McCain a absolument raison. Nous ne pouvons pas tolérer un Iran nucléaire. Cela changerait totalement les règles du jeu. Non seulement, ce serait une menace pour Israël, un pays qui est notre allié indéfectible, mais également cela créerait un environnement qui déclencherait une course aux armements au Moyen-Orient. Voilà ce que nous devons faire. Nous avons besoin de sanctions plus rigoureuses. Je ne suis pas d'accord avec le sénateur McCain. Je ne pense pas que nous puissions réussir à imposer ces sanctions sans la coopération de pays comme la Russie ou la Chine qui ne sont pas des démocraties – le sénateur McCain sera d'accord avec moi - , mais qui ont de nombreux liens commerciaux avec l'Iran. Et qui potentiellement ont un intérêt à ce que l'Iran n'ait pas une arme nucléaire. Mais nous devons entamer également des négociations directes et dures avec l'Iran. Et c'est là la principale différence qui m'oppose au sénateur McCain qui défend l'idée qu'on punit les gens en refusant de leur parler. Ça n'a pas fonctionné en Iran, en Corée du Nord. Dans chacun de ces deux cas, nos efforts en vue d'isoler ces deux pays a, en fait, accéléré leurs efforts pour acquérir l'arme nucléaire. Cela changera lorsque je serai président des Etats-Unis.

John McCain : Le sénateur Obama a dit, à deux reprises, au cours du débat, qu'il allait s'asseoir avec Ahmadinejad, Chavez et Raul Castro sans condition préalable. Là vous avez Ahmadinejad qui est à New York et qui parle de l'extermination de l'Etat d'Israël et qui parle d'éradiquer Israël de la carte du monde. Et nous allons donc nous asseoir sans condition préalable pour légitimiser et donner une plate-forme de propagande à une personne qui préconise l'extermination de l'Etat d'Israël. Et donc, nous allons lui donner plus de crédibilité dans le monde et, par conséquent, donner à penser qu'ils se sont bien comportés puisque vous allez vous asseoir autour de la même table qu'eux, ce qui va légitimiser leur comportement illégal. Je voudrais souligner que par le passé, que l'on cite l'exemple de Ronald Reagan qui n'a pas voulu négocier avec Brejnev, Andropov et Tchernenko jusqu'à ce que Gorbatchev n'instaure la Glassnost et la Perestroïka. Ou que l'on cite l'exemple du voyage de Nixon en Chine qui a été précédé par les nombreuses visites préalables de Kissinger. Bon, moi, je veux bien m'asseoir autour d'une table avec n'importe qui mais il faut qu'il y ait des conditions préalables. Et une de ces conditions, c'est que l'on ne peut pas légitimiser par une rencontre face-à-face un individu comme Ahmadinejad. Le sénateur Obama a dit sans condition préalable.

Barack Obama : Tout d'abord, Ahmadinejad n'est pas la personne qui a le plus de pouvoir en Iran. Donc ce n'est peut-être pas le bon interlocuteur. Mais en tant que président des Etats-Unis, je me réserve le droit de rencontrer n'importe qui, quand je le souhaite. Si je pense que cela peut préserver la sécurité des Etats-Unis. Et je suis content que le sénateur McCain ait évoqué notre histoire bipartisane en matière de diplomatie. Le sénateur McCain a mentionné Henry Kissinger qui est l'un de ses conseillers et qui, comme cinq secrétaires d'Etat récents, a déclaré que nous devrions rencontrer l'Iran et ceci sans condition préalable. Il s'agit de l'un de vos conseillers qui a dit ça. Comprenons-nous bien, qu'est-ce que cela signifie sans condition préalable. Cela ne veut pas dire qu'on les invite à prendre le thé. Cela veut dire que nous ne faisons plus ce que nous avons fait jusqu'à présent, c'est-à-dire affirmer tant que vous n'acceptez pas de faire exactement ce que nous voulons, nous n'aurons pas de contact direct avec vous. Il y a une différence entre condition préalable et préparation. Bien sûr, il faut se préparer ! En commençant avec des discussions diplomatiques de bas niveau. Et il se peut que cela ne marche pas parce que l'Irak est un régime voyou. Je ferai remarquer que l'on m'a taxé de naïveté lorsque j'ai suggéré que nous devions envisager l'hypothèse de contact avec l'Iran.

Et d'ailleurs, le président Bush lui-même a dit récemment qu'un ambassadeur de haut niveau, Bill Burns allait participer à des pour-parlers avec des Européens pour discuter de l'arme nucléaire en Iran. Là encore, cela ne va peut-être pas marcher. Mais si cela ne marche pas, cela aura renforcé nos capacités à nouer des alliances pour imposer les sanctions lourdes que le sénateur McCain vient de mentionner. Pour prendre un autre exemple, en Corée du Nord, nous avons interrompu les pourparlers. Rappelez-vous de l'Axe du Mal. Pas question de négocier avec eux. Et qu'est-ce qui s'est passé ? Ils ont quadruplé leur capacité nucléaire. Ils ont testé leurs missiles. Ils se sont retirés du traité de non-prolifération. Et ils ont envoyé des secrets nucléaires dans des pays comme la Syrie. Et lorsque nous avons redémarré les négociations – car là encore, l'administration Bush a changé d'avis – nous avons réussi à faire des progrès bien qu'actuellement, nous ayons des problèmes en Corée du Nord et nous sommes sur un terrain fragile. L'administration Bush ainsi que certains conseillers du sénateur McCain pensent que c'est important et le sénateur McCain fait de la résistance. Il a même dit, l'autre jour, qu'il ne rencontrerait pas le premier ministre de l'Espagne, parce qu'il n'était pas sûr qu'il était aligné sur la politique américaine. Imaginez-vous l'Espagne ! L'Espagne est un allié de l'OTAN, si nous ne pouvons même pas rencontrer nos amis, je ne sais pas qui nous allons rencontrer lorsqu'il s'agit de discuter de sujets critiques comme le terrorisme.

John McCain : Je n'ai pas l'intention de fixer le calendrier des visites présidentielles avant de devenir président des Etats-Unis. Le docteur Kissinger n'a pas dit qu'il préconisait une rencontre face-à-face entre le président des Etats-Unis et le président Hamadimejab. Il a dit qu'il pourrait y avoir des rencontres au niveau des secrétaires d'Etat ou de bas niveau, et je les ai toujours encouragés. Les Iraniens ont rencontré l'ambassadeur Crocker à Bagdad. Ce que le sénateur Obama semble ne pas comprendre c'est que s'il n'y a pas de condition préalable, on s'assied autour d'une table avec quelqu'un qui a appelé Israël "cadavre puant". Et qui veut supprimer ce pays de la carte du monde. Dans ce cas là, vous légitimisez ces remarques. C'est dangereux, c'est pas seulement naïf, c'est dangereux. Et là, nous avons une divergence fondamentale. En ce qui concerne la Corée du Nord, notre secrétaire d'Etat, Madeleine Allbright s'est rendu en Corée du Nord. D'ailleurs, la Corée du Nord a un des régimes les plus brutaux et répressifs du monde. Les Coréens du Sud, en moyenne, ont une taille de 3 inch supérieure à la taille des Coréens du Nord, en moyenne. Nous ne connaissons pas l'état de santé du "président adoré" actuellement. Mais nous savons une chose, c'est que les Coréens du Nord ont rompu tous les accords qu'ils avaient signés jusqu'à présent. Il n'est certainement pas envisageable de s'asseoir autour d'une table avec eux, sans condition préalable. Contrairement à ce qu'a dit le sénateur Obama, c'est tout simplement dangereux.


Barack Obama : Le sénateur McCain n'arrête pas d'utiliser cet exemple d'un président qui s'asseoirait autour d'une table pour négocier sans pourparlers préalables. Personne n'a envisagé cela. Comme le fait fort bien le sénateur McCain, c'est une présentation fallacieuse de ma position. Lorsque l'on parle de condition préalable, et Henry Kissinger a dit que l'on devrait avoir des contacts sans condition préalable, l'idée, c'est que nous ne pouvons espérer résoudre tous les problèmes avant de commencer les pourparlers. L'administration Bush a admis que cela n'avait pas fonctionné, cette idée que nous refusons de parler à un ennemi. Et l'idée que l'on pourrait rencontrer Ahmadinejad et ne pas réagir alors qu'il profère toutes ces absurdités est ridicule. Personne n'envisage cela.

John McCain : Alors, essayons de comprendre. Nous rencontrons Ahmadinejad qui nous dit nous allons supprimer Israël de la carte et nous, nous lui rétorquons, il n'en est pas question. Allons donc ! Je pense que le docteur Kissinger, qui est mon ami depuis trente-cinq ans, serait fort intéressé par cette conservation et la conception qu'a le sénateur Obama de sa position sur cette question. Cela fait trente-cinq ans que je connais et je peux vous garantir qu'il ne préconiserait pas des pourparlers au niveau présidentiel. Bien sûr, il préconiserait – et d'autres personnes le font – des contacts et des négociations. C'est ce que l'on fait tout le temps. Le sénateur Obama détourne le sens des mots lorsqu'il dit que les conditions préalables veulent dire préparation.

Barack Obama : Je ne détourne pas le sens des mots, j'utilise les mêmes termes que ceux utilisés par vos conseillers.

Question : La Russie, 2 minutes, sénateur Obama. Comment voyez-vous les relations avec la Russie ? Vous la voyez comme concurrente ou comme ennemie ou comme partenaire éventuel ?

Barack Obama : Etant donné ce qui s'est passé depuis quelques semaines ou depuis quelques mois, notre démarche vis à vis de la Russie doit être évaluée parce qu'une Russie très agressive et renaissante est une menace pour la paix et la stabilité dans la région. Ce qu'elle a fait en Géorgie est inacceptable. Ils n'étaient pas désirés et le prochain président devra absolument respecter le cessez-le-feu en six points. Il faudra que la Russie se retire de l'Ossétie du Sud et d'Abkhazie. Il est absolument nécessaire d'avoir un front uni et d'expliquer aux Russes qu'on ne peut pas être une super puissance ou une puissance au XXIe siècle et se comporter comme une dictature du XXe siècle. Il faut également soutenir toutes les démocraties naissantes dans cette région, les Estoniens, les Lithuaniens, les Lettons, les Polonais, les Tchèques et leur montrer notre soutien et notre solidarité dans leurs efforts. Ils sont des membres de l'OTAN. Pour la Géorgie et l'Ukraine, je crois qu'il faut insister sur le fait qu'ils sont libres de rejoindre l'OTAN si ils arrivent à répondre à ses exigences. Ils doivent mettre sur pied immédiatement un plan d'action pour devenir membre de l'OTAN pour qu'on puisse les intégrer. On ne peut pas maintenant revenir à un état de guerre froide avec la Russie. Il faut reconnaître qu'il y a des domaines d'intérêt commun avec la Russie, en premier lieu la prolifération nucléaire. Ils ont 15 000 têtes nucléaires mais ils ont de quoi en construire encore 40 000 et certaines de ces armes pourraient tomber entre les mains d'Al-Qaida. C est un sujet que j'ai lancé au Sénat. J'ai travaillé un Républicain Dick Lugar pour aborder la question de la prolifération des armes nucléaires. C'est un domaine dans lequel il faudra travailler avec la Russie mais il faut être parfaitement clair : il ne faut pas uniquement regarder la Russie dans les yeux pour voir son âme, il faut parler à la Russie en lui montrant les intérêts nationaux des Etats-Unis dans le domaine de la sécurité. Il faut admettre que récemment la communauté internationale et nos alliés ont répondu fermement.

Question : Deux minutes pour vous sénateur McCain sur la Russie.

John McCain : Les réactions du sénateur Obama m'ont intéressé quand il a parlé de la Russie contre la Géorgie. Ce qu'il a dit en premier c'est que les deux partis devaient montrer leur force. Là encore, il est naîf. Il ne comprend pas que la Russie a commis une agression grave contre la Georgie. La Russie est maintenant une nation qui tire sa force des pétrodollars avec un gouvernement d'apparatchiks du KGB. J'ai regardé M. Poutine et j'ai vu trois lettres : KGB. Leur agression en Géorgie n'est pas un comportement acceptable. Je ne crois pas que l'on va retourner à un état de guerre froide, je suis certain que cela n'arrivera pas. Je crois qu'il faut soutenir nos amis et nos alliés et d'ailleurs ce n'est pas juste un problème entre la Russie et la Géorgie. En fait c'est très étroitement lié à l'énergie. Il y a un gazoduc qui va de la mer Caspienne, qui passe par la Géorgie et ensuite passe par la Turquie. Bien sûr, on sait que les Russes contrôlent d'autres sources d'énergie qu'ils distribuent en Europe. Ils ont utilisé cet argument de temps en temps. Ce n''est donc pas un hasard si les présidents de la Lettonie, de l'Estonie et de Lithuanie, de Pologne et d'Ukraine se sont rendus en Géorgie et à Tbilissi.

Moi-même j'ai passé beaucoup de temps là-bas avec ce jeune président, Micha Saakachvili. Ils ont montré leur solidarité et lui ont dit qu'ils étaient préoccupés concernant les menaces russes qui consistent à reconstruire l'ancien empire russe. Je pense que les Russes devraient comprendre que nous, les Etats-Unis, nous soutiendrons l'intégration de la Georgie et de l'Ukraine dans un processus naturel d'intégration au sein de l'OTAN. Il faut dire également clairement que les Russes violent leurs accords de cessez-le-feu. Ils ont placé des troupes supplémentaires en Abkhazie et en Ossétie du Sud. D'ailleurs je m'y suis rendu une fois. J'ai vu en territoire géorgien une affiche énorme de Vladimir Poutine qui disait : "Vladimir Poutine, notre président". Les intentions des Russes étaient donc très claires. Ils attendaient juste le bon moment pour saisir cette occasion. Donc la situation est très difficile. Nous voulons travailler avec les Russes mais nous avons le droit d'attendre d'eux qu'ils se conduisent bien avec un pays, qu'ils respectent les frontières internationales et les règles de comportement qui s'appliquent à tous les pays. Etudions l'Ukraine. Tout ceci à beaucoup à voir avec l'Ukraine, la Crimée, la base de la flotte russe à Sébastopol et l'effondrement du processus politique en Ukraine entre Timochenko et Iouchtchenko est un problème grave. Attention à l'Ukraine. Il faut que les Ukrainiens comprennent que nous sommes leurs amis et leurs alliés.

Question : Est-ce que vous êtes en désaccord avec le sénateur McCain ?

Barack Obama : Non je crois qu'en fait le sénateur McCain et moi sommes dans l'ensemble d'accord sur ces sujets. Bien sûr, je ne suis pas d'accord avec l'idée selon laquelle nous ne nous sommes pas opposés avec assez d'énergie lorsque les Russes sont entrés en Géorgie. J'ai immédiatement dit que c'était illégal et que je m'y opposais. Oui, tout à fait, je souhaite que cette violence cesse parce qu'il y a une énorme pression sur la Géorgie. C'est pour cela que j'étais le premier à dire qu'il fallait reconstruire l'économie géorgienne et que j'ai souhaité lever un milliard de dollars qui leur a été maintenant envoyés pour la reconstruction. L'un des objectifs dela Russie était d'affaiblir leur économie pour que le président Saakachvili soit affaibli et remplacé par quelqu'un que Poutine préfèrerait. Il y a selon moi deux choses très importantes concernant la Russie.

Premièrement, il nous faut être clairvoyant et anticiper certains de ces problèmes. En avril j'ai prévenu l'administration qu'il y avait des Forces de la paix russes en territoire géorgien. Cela n'avait aucun sens. Ce qu'il fallait c'était les remplacer par des forces internationales et des envoyés spéciaux pour résoudre cette crise avant qu'elle ne prenne trop d'ampleur. Mais cela n'a pas été fait. Si cela avait été fait, on en serait pas là. Deuxièmement, il s'agit de la question de l'énergie. La Russie renait d'une certaine manière et Poutine se sent puissant grâce aux pétrodollars comme l'a dit le sénateur McCain. Cela veut dire que nous qui sommes l'un des plus grands consommateurs de pétrole –25 % de la production mondiale- devons avoir notre propre stratégie énergétique, non seulement pour faire face à la Russie mais également faire face à de nombreux Etats voyoux dont nous avons parlé : Iran et Vénézuéla. Cela veut dire augmentation de la production nationale et forages en off-shore. Mais nous n'avons que 3 % des ressources en pétrole dans le monde alors que nous consommons le quart de la production mondiale. C'est difficile de trouver une bonne solution à ce problème. Il faut donc se tourner vers des énergies nouvelles : solaire, éolien, biocarburants et oui, l'énergie nucléaire, les technologies sans charbon. Vous savez mon plan vise à investir beaucoup d'argent dans les 10 ans à venir pour cela. Je crois que le sénateur McCain et moi sommes d'accord sur le fait que l'énergie est un sujet important. Mais comme l'a dit le sénateur McCain, il faut voir ce que nous avons fait par le passé. En l'espace de 26 ans le sénateur McCain a voté 23 fois contre ces nouvelles énergies, le solaire, l'éolien et les biocarburants. Donc, il faut joindre les actes à la parole lorsqu'on parle d'indépendance énergétique. Parce que cela va être sûrement être essentiel pour notre économie. Les gens souffrent à la pompe et l'hiver approchant, pour se procurer du fuel pour se chauffer. Il en va de notre sécurité nationale sans oublier le changement climatique.

Question : Nous avons encore le temps pour une question et je souhaiterais une réponse rapide.

John McCain : Personne en Arizona n'est contre l'énergie solaire et le sénateur Obama dit qu'il est en faveur du nucléaire mais il ne veut pas stocker et retraiter les déchets nucléaires !

Barack Obama : Non ce n'est pas vrai John, ce n'est pas vrai.

John McCain : Il reste du chemin à parcourir. Le forage off-shore c'est aussi très important. Cela sert de passerelle. On sait que si l'on fore en mer et qu'on exploite ces réserves, cela nous aidera au moins pendant un certain temps et soulagera notre dépendance. Je pense que cela aura une incidence importante sur le prix du baril.

Barack Obama : Je veux répondre rapidement pour corriger ce qui vient d'être dit.

John McCain : Ce que je veux dire c'est que la loi Nunn-Luger...

Question : Pardon Sénateur

Barack Obama : John ?

John McCain : J'ai soutenu Nunn-Luger au début des années 90 alors que beaucoup de mes collègues ne le faisaient pas. C'était une loi essentielle à l'époque et cela nous a permis de nous débarrasser de la question des déchets nucléaires et de la façon de gérer le nucléaire.

Barack Obama : Je dois corriger quelque chose. Je n'ai jamais dit que j'étais contre les déchets nucléaires. Je dis qu'il faut les stocker d'une façon sûre alors que le sénateur McCain parle de l'Arizona. Je voulais apporter cette correction.

John McCain : J'ai toujours voté en faveur des énergies alternatives. D'ailleurs personne ne peut être contre.

Question : C'est la dernière question. Vous avez deux minutes chacun. La question est, en commençant par vous sénateur McCain. Que pensez-vous de l'éventualité d'une nouvelle attaque style 11-Septembre sur le territoire américain ?

John McCain : Je pense que l'insécurité est bien moindre que juste après le 11-Septembre. Je pense que notre nation est plus sûre, mais nous sommes encore loin d'avoir une sécurité totale. Et je dois vous dire qu'il y a une chose parmi d'autres dont je suis fier - parce que j'ai travaillé avec tous les courants politiques et j'ai un long palmarès en la matière avec une longue série de réformes -, après le 11-Septembre, le sénateur Libermann et moi-même avons décidé de constituer une commission d'enquête sur le 11-Septembre pour voir ce qui s'était passé et trouver une solution. Nous nous sommes heurtés à l'opposition de l'administration. Encore une question où je n'étais pas d'accord avec l'administration. Et nous avons insisté jusqu'à ce que les familles touchées par le 11-Septembre se déplacent jusqu'à Washington et, à ce moment-là, nous avons réussi à promulguer la législation. Une série de recommandations a été adoptée, plus de quarante, et je suis content de pouvoir dire que nous avons pu faire passer la plupart des réformes recommandées par cette commission. Je suis fier de ce travail, là encore bipartisan, impliquant tous les courants politiques, avec une coopération entre les démocrates et les républicains.

Donc, nous avons beaucoup de progrès à faire au sein de nos services de renseignements. Nous devons améliorer notre travail en matière de renseignements humain et nous devons nous assurer de former correctement les personnes responsables de l'interrogation des prisonniers pour éviter à l'avenir la torture. Nous devons améliorer nos capacités en matière technologique et en matière de renseignement. Nous devons coopérer plus étroitement avec nos alliés. Je connais nos alliés, et je peux coopérer plus étroitement avec eux. Mais je peux vous affirmer qu'à mon sens, les Etats-Unis sont plus en sécurité aujourd'hui que le 11-Septembre. Ce qui ne veut pas dire que nous n'avons pas encore beaucoup de chemin à parcourir. Et je voudrais vous rappeler également qu'à la suite de ces recommandations, nous avons probablement procéder à la plus importante réorganisation au sein de notre gouvernement depuis que nous avons créé le ministère de la défense. Et je pense que les hommes et les femmes qui travaillent dans ces services font un excellent travail. Mais nous avons encore beaucoup de chemin à parcourir avant de pouvoir déclarer que les Etats-Unis vivent dans la sécurité et cela implique qu'il faut améliorer le travail que nous faisons le long de nos frontières.

Question : Deux minutes sénateur Obama

Barack Obama : Eh bien, tout d'abord, je pense qu'effectivement, nous avons plus de sécurité à certains égards. Evidemment, nous avons investi des milliards de dollars dans la sécurité de nos aéroports. Nous avons amélioré la sécurité de cibles potentielles mais nous avons encore du pain sur la planche. Nous devons sécuriser nos sites chimiques. Nous n'avons pas suffisamment amélioré la situation du point de vue des transports et des ports. Et la principale menace à laquelle nous sommes confrontés actuellement, ce n'est pas un missile nucléaire qui tomberait du ciel, cette menace se trouve dans une valise. C'est pourquoi, la question de la prolifération nucléaire est si importante. La principale menace pour les Etats-Unis viendrait d'un terroriste qui s'emparerait d'armes nucléaires. Nous, nous dépensons des milliards de dollars pour le bouclier antimissile. En fait, je pense que nous avons besoin de ce bouclier à cause de l'Iran et de la Corée du Nord et de la possibilité qu'ils ont d'acquérir et de lancer des armes nucléaires, mais je crois aussi que lorsque nous dépensons quelques centaines de millions de dollars pour lutter contre la prolifération nucléaire, nous faisons une erreur. Il y a une autre chose sur laquelle nous devons cependant nous concentrer, c'est Al-Qaida.

Cette organisation opère désormais dans soixante pays. Nous ne pouvons pas nous concentrer sur l'Irak. Nous devons nous attaquer à la racine du mal, c'est-à-dire en Afghanistan et au Pakistan. Cela va être critique. Nous aurons besoin de davantage de coopération avec nos alliés. Et une dernière remarque : il est important pour nous de comprendre que la manière dont nous sommes perçus dans le monde va faire une différence. Du point de vue de notre capacité à obtenir de la coopération et à exterminer le terrorisme. L'une des choses que j'ai l'intention de faire en tant que président, c'est de rétablir l'image de l'Amérique dans le monde. Nous sommes moins respectés maintenant que nous ne l'étions il y a huit ans ou même quatre ans. Nous vivons dans le plus grand pays du monde. Cependant, à cause de certaines erreurs qui ont été faites – et je rends hommage au sénateur McCain pour avoir identifié le problème de la torture comme quelque chose qui sape notre sécurité à long terme – nous allons avoir beaucoup de travail lors de la prochaine administration pour rétablir cette idée que l'Amérique est un phare qui brille sur une colline.

Question : Est-ce que vous êtes d'accord pour dire qu'il y a pas mal de travail dans ce domaine pour la nouvelle administration.

John McCain : Mais dans le cas du bouclier antimissile, le sénateur Obama a dit et je cite qu'il fallait que son efficacité soit prouvée. Elle n'a pas été prouvée lorsque Ronald Reagan a lancé la Special Defense Initiative (SDI), ce qui est un bouclier antimissile. Et cela a été un facteur primordial dans la fin de la guerre froide. Il semble que nous tournions en rond à nouveau. Le sénateur Obama ne comprend pas bien que si nous échouons en Irak, cela encouragera Al-Qaida. Dans ce cas, ils établieraient une base en Irak. Le plan de retrait du sénateur Obama aboutirait à une défaite quelles que soient les conditions selon tous nos chefs militaires et tous nos experts. Cela signifierait que le sang américain aurait été sacrifié en vain. Ce qui nous attristerait profondément. Tout ceci aura été en vain si nous appliquions le plan du sénateur Obama avec un retrait à des dates spécifiques quelles que soient les conditions sur le terrain. Le général Petraeus affirme que nous avons remporté des succès mais qui sont encore très fragiles. Et nous ne pouvons pas appliquer le plan du sénateur Obama. C'est la question cruciale de notre époque et je pense que les Américains décideront du prochain président des Etats-Unis suivant le bon ou le mauvais chemin que nous déciderons d'emprunter.

Question : Est-ce que vous y voyez les mêmes liens que le sénateur McCain.

Barack Obama : Oui, indubitablement. Ecoutez, au cours des huit dernières années, cette administration avec le sénateur McCain s'est concentrée uniquement sur l'Irak. Cela a été leur priorité. C'est là où toutes nos ressources ont été investies. En attendant, Ben Laden existe toujours, il n'a pas été capturé. Il n'a pas été tué. Al-Qaida est de nouveau actif. En attendant, nous avons des défis à relever. Par exemple, la Chine à laquelle nous empruntons des milliards de dollars. La part de notre endettement détenue par les Chinois se monte à 1 000 milliards de dollars. Et ils sont actifs dans des continents comme l'Amérique latine, l'Asie ou l'Afrique. Ils sont d'autant plus visibles que nous sommes absents parce que nous nous sommes concentrés sur l'Irak. Nous avons affaibli notre capacité à profiter de notre puissance dans le monde parce que nous avons tout regardé à travers une seule lorgnette et je ne parle même pas de notre économie. Nous dépensons maintenant 10 milliards de dollars ou davantage chaque mois. Cela signifie que nous ne pouvons pas fournir suffisamment de soins médicaux aux personnes qui en ont besoin. Nous ne pouvons pas investir suffisamment dans les domaines scientifique et technologique, ce qui aura un impact sur notre compétitivité future. Il n'y a jamais eu de pays dans le monde dont l'économie est en déclin et qui puisse quand même maintenir sa supériorité militaire. Il s'agit donc d'une question de sécurité nationale. Nous n'avons pas suffisamment investi en ce qui concerne les mesures en faveur des anciens combattants. Je suis membre de la Commission des anciens combattants et nous sommes assiégés de questions par les vétérans de tout le pays qui nous demandent comment obtenir des indemnités d'invalidité ? "Je souffre du syndrome du choc post-traumatique et je n'arrive pas à obtenir de traitement." Par conséquent, nous devons tout mettre en œuvre dès à présent et il n'est pas question de perdre cette guerre. Il s'agit de reconnaître que le prochain président doit avoir une vision stratégique plus large concernant les défis auxquels nous sommes confrontés. Cette vision était absente au cours des huit dernières années. C'est cela que je veux rétablir.

John McCain : J'ai été impliqué, comme je vous l'ai déjà dit, dans la plupart des grands défis de sécurité nationale auxquels nous avons été confrontés depuis 20 ans. Il y a quelques avantages à avoir de l'expérience, des connaissances et du discernement. Honnêtement, je ne pense pas que le sénateur Obama ait les connaissances ou l'expérience. Il a fait des erreurs de jugement dans un certain nombre de domaines y compris dans sa réaction initiale à l'invasion russe… à l'agression russe en Géorgie. Vous savez, nous avons déjà connu dans ce gouvernement cette obstination à s'accrocher à cette idée que la déferlante n'avait pas réussi. Il n'a pas su reconnaître qu'il avait eu tort quant à le "surge" (renfort). Cela montre qu'un président des Etats-Unis a besoin de faire preuve de plus de souplesse. Pour ce qui est des autres questions qu'il a soulevées, je connais les anciens combattants, je les connais bien. Et je sais qu'ils savent que je m'occuperai bien d'eux. Je suis fier de leur appui et de leur reconnaissance pour les services que je leur ai rendus. Je les aime et je m'occuperai d'eux et ils savent que je m'occuperai d'eux. A moi de le faire , ce sera ma responsabilité. J'ai également la capacité, les connaissances et l'expérience pour prendre les bonnes décisions pour préserver la sécurité et la sûreté de ce pays. Les réformes, la prospérité et la paix constituent les défis principaux pour les Etats-Unis d'Amérique. Je ne pense pas avoir besoin d'une formation sur le tas. Je suis prêt dès maintenant.

Barack Obama : Permettez-moi de faire une dernière conclusion. Vous savez que mon père venait du Kenya d'où mon nom. Dans les années 60, mon père avait écrit d'innombrables lettres pour pouvoir venir faire ses études universitaires aux Etats-Unis, persuadé qu'il était qu'aucun autre pays sur terre ne pourrait lui offrir les mêmes possibilités. Les idéaux et les valeurs des Etats-Unis étaient une source d'inspiration pour le monde entier. Je ne pense pas qu'aucun de nous puisse dire que notre image dans le monde aujourd'hui, la manière dont les enfants du monde entier voient les Etats-Unis soit la même. Une partie de ce que le prochain président doit faire, et cela relève en partie de notre discernement, et c'est aussi comme cela que nous préserverons l'Amérique, consistera à envoyer le message suivant au monde : nous allons investir dans des domaines tels que l'éducation auxquels les personnes ordinaires qui aspirent à réaliser leur rêve peuvent s'identifier. C'est ce à quoi je m'engagerai en tant que président des Etats-Unis.

Question : Il reste quelques secondes. Nous avons presque terminé.

John McCain : Jim, quand je suis rentré chez moi après avoir été prisonnier, j'ai vu que nos anciens combattants étaient très maltraités et cela m'a attristé. J'ai entrepris des efforts pour résoudre la question des prisonniers de guerre et les portés disparus au combat. Ce que nous avons fait, autant du côté des démocrates que des républicains. Puis j'ai travaillé à la normalisation des relations entre nos deux pays pour que nos anciens combattants puissent retrouver le chemin de la maison. Je vous garantis qu'en tant que président des Etats-Unis je sais comment panser les blessures de la guerre, je sais comment traiter nos adversaires et je sais comment travailler avec nos amis.


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