jeudi 30 avril 2009

La FIDH dénonce la recrudescence des exécutions en Iran

La Fédération des ligues des droits de l'homme (FIDH) publie, mercredi 29 avril, une étude très critique sur l'usage de la peine de mort en Iran et la législation répressive iranienne. On peut y lire que la République islamique détient juste derrière la Chine le record mondial des exécutions. En l'absence de statistiques officielles, Amnesty International et d'autres ONG estiment qu'entre 2000 et 2008, de 1 546 à 2 056 personnes ont été exécutées, dont environ 40 % ces dernières deux années. Tendance "à la hausse" qui se confirme pour 2009 où depuis janvier 120 condamnés ont été tués.

La FIDH qui dénonce les exécutions publiques (pendaisons) et de "masse" (38 ont eu lieu le 15 juillet et le 2 août 2007, dont 16 en public et 4 montrées à la télévision), pointe aussi le fait que les prisonniers n'ont pas toujours de procès "équitables", que des décès et des suicides "suspects" se produisent en prison et surtout que Téhéran ne tient pas ses engagements.

Ainsi, bien que l'Iran ait ratifié la Convention sur les droits de l'enfant, des mineurs adolescents au moment des faits incriminés sont toujours exécutés. On les laisse en détention, jusqu'à ce qu'ils atteignent leurs 18 ans. Huit ont été exécutés en 2008 (l'un d'eux Behmam Zare avait 15 ans au moment des faits) ; 12 en 2007 et une quarantaine en 20 ans.

De même, bien que le responsable du système judiciaire, l'ayatollah Shahroodi, ait écrit un mémorandum interdisant les lapidations en décembre 2002 et donné en 2006 des assurances aux pays européens qui s'émouvaient de ces pratiques, les lapidations ont toujours lieu. Elles sont parfaitement codifiées : si le condamné est un homme il est enterré debout jusqu'à la taille, si c'est une femme, jusqu'à la poitrine. Les pierres ne doivent pas être trop grosses pour que le supplicié "ne soit pas tué en deux ou trois jets de pierre", ni trop petites, car inefficaces. Au moins trois personnes ont été lapidées en un an, dont un couple.

"Au moment où dans le monde entier, y compris la société civile iranienne, des voix s'élèvent contre la peine de mort, Téhéran s'est doté de la législation pénale la plus extrême, résume le vice-président de la FIDH, Karim Lahidji. C'est une véritable machine de répression qui sert à museler opposition et minorités à travers les délits d'opinion ou le crime dit d'apostasie."


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une militante féministe condamnée

Une militante féministe iranienne, Parastou Allahyari, a été condamnée à un an de prison, a rapporté aujourd'hui le quotidien modéré Sarmayeh.

Le quotidien n'a pas donné les motifs de cette condamnation. Selon des sites internet féministes, elle a été condamnée pour sa participation à la pétition "un million de signatures", qui vise à obtenir l'égalité des droits pour les femmes en Iran.

Mme Allahyari a été condamnée pour "action contre la sécurité nationale en faisant de la propagande contre le système de la République islamique", selon ces sources, qui n'ont pas précisé la date de son arrestation.
Elle peut faire appel du verdict.

Par ailleurs, selon Sarmayeh, une autre militante féministe, Maryam Malek, a été arrêtée en début de semaine et se trouve depuis détenue à la prison d'Evine, dans le nord de la capitale iranienne.

Les autorités iraniennes exercent continuellement des pressions sur les défenseurs des droits des femmes, notamment avec la condamnation ces derniers mois de plusieurs féministes à des peines de prison.


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mercredi 29 avril 2009

La démocratie n'est pas un luxe à l'occidentale, par Chirin Ebadi

On me demande souvent si la démocratie vue de mon pays, la République islamique d'Iran, n'est qu'une sorte de luxe à l'occidentale ou une réalité solidement établie ? Comment répondre à pareille question, sinon en définissant précisément ce qu'est à mes yeux la démocratie ?

La démocratie au sens classique du terme signifie la gestion du pouvoir par le gouvernement d'une majorité issue d'élections libres. Cependant, cette majorité doit respecter certaines règles, car il ne faut pas oublier que plusieurs dictatures sont arrivées au pouvoir à la suite d'élections comme ce fut le cas, dans le passé, avec l'arrivée d'Hitler en Allemagne.

Par conséquent, nous devons établir un cadre qui doit être respecté par le pouvoir. Ce cadre, je le nomme cadre démocratique et il ne consiste en rien d'autre que le respect des règles qui protègent les droits de l'homme. C'est dans ce contexte que la majorité arrivée au pouvoir peut justifier sa légitimité. Si elle ne respecte pas ces règles, elle n'a aucune légitimité démocratique.

Des exemples ? Un gouvernement élu certes, mais qui sous le prétexte de la religion applique une politique discriminatoire à l'égard des femmes, soit la moitié de la population dans un pays comme l'Iran, peut-il être considéré comme un pouvoir démocratique ? Je ne crois pas. De la même manière, une majorité au pouvoir ne peut au nom de son idéologie empêcher les gens de s'exprimer, car, en faisant cela, elle viole la liberté d'expression comme cela se passe à Cuba ou en Chine.

Un système libéral comme celui des Etats-Unis d'Amérique n'est pas à l'abri de dérives non plus : avec ce qui s'est passé sous la présidence de George Bush en matière d'atteintes aux droits et aux libertés fondamentaux, peut-on encore dire que ce gouvernement pouvait être considéré comme démocratique ? La réponse est non.

En conséquence, la légitimité d'un gouvernement n'émane pas seulement du suffrage universel mais aussi du respect du droit et des libertés de tous les citoyens, sans distinction de race, de sexe, de religion, d'opinion politique, etc.

Nous constatons d'autre part que dans certains pays des mouvements islamistes arrivent au pouvoir, comme en Turquie. Parmi les premières mesures prises par le gouvernement turc figurait la suppression de la loi sur l'interdiction du hidjab dans les universités. Cette réforme ne me choque pas, mais une grande majorité des femmes turques craint que dans l'avenir le port du foulard ne soit obligatoire, comme c'est le cas actuellement en Iran. Et elles ont raison de s'interroger.

Par ailleurs, en Afghanistan, pour donner satisfaction aux fondamentalistes et aux intégristes, le Parlement est en train de faire passer des lois qui privent les femmes afghanes de droits qui leur sont reconnus dans la Constitution.

Ces gouvernements, sous le prétexte qu'à leurs yeux l'islam n'est pas compatible avec la démocratie, justifient ainsi la nature antidémocratique de leur politique. Ils considèrent que la démocratie est une notion occidentale qui ne peut, à aucun moment, prendre le pas sur l'islam et ils qualifient leur système politique de "démocratie islamique". Un terme qui, pour eux, établit la primauté des lois religieuses sur la volonté populaire.

Il ne faut pas pour autant conclure un peu rapidement qu'islam et démocratie sont incompatibles. Car, on le voit constamment, dans la plupart des pays musulmans, il y a des mouvements modernes qui pensent que la charia n'est pas le message principal du prophète. En effet, il faut distinguer le message divin des règles de la charia, édictées il y a plusieurs siècles, afin de trouver des solutions pour la vie quotidienne de la population de notre époque. C'est le meilleur moyen d'éviter quelques aberrations.

Par exemple, actuellement, dans les pays musulmans, l'esclavage est interdit légalement, mais il est autorisé par la charia. Alors, parce que la charia dit que les femmes n'ont pas les mêmes droits que les hommes et les non-musulmans les même droits que les musulmans, faut-il que légalement, dans leurs pays respectifs, les femmes, les minorités religieuses ou d'autres couches sociales continuent à être victimes de discrimination et ne soient pas considérées comme des citoyens de plein droit ?

Nous, musulmans modernes, pensons qu'il n'y a pas d'incompatibilité entre la démocratie et l'islam, que les termes comme "la démocratie islamique" ou les droits de l'homme "islamiques" sont en fait utilisés par les gouvernements non démocratiques pour justifier leur façon de gouverner et leur pouvoir illégitime.

Regardons ce qui se passe lors des élections dans ces pays-là : dans la Déclaration universelle des droits de l'homme, il est précisé que les élections doivent être générales, libres, honnêtes et à bulletin secret. Mais dans des pays où la moitié de la population ne sait ni lire ni écrire, comment le secret du vote peut-il être respecté ? Et dans d'autres pays où une grande partie de la population n'a que 1 dollar par jour pour vivre et où le pouvoir grâce à ses pétrodollars a tous les moyens financiers d'acheter des voix aux plus pauvres, comment peut-on dire que les élections sont libres et honnêtes ?

Par conséquent, je dirai que tant que les élections ne sont pas conformes aux règles des droits de l'homme, la majorité arrivée au pouvoir à la suite du suffrage universel ne peut être considérée comme une majorité légitime et démocratique.

Pour prendre le cas de l'Iran, qui en juin va élire son président, je voudrais faire remarquer que toutes nos élections, législatives ou présidentielle, sont faites sur le même moule : le suffrage est un suffrage restreint. Je m'explique : c'est le Conseil des gardiens, rouage essentiel de la République islamique, dont les membres sont nommés par le Guide suprême, qui approuve les listes électorales et les candidats. Ce qui se traduit par une sélection de noms. Et ensuite c'est sur ces bases que les électeurs sont appelés à voter. Reprenant le mot d'un ami juriste, je dis que ce n'est plus une "élection" mais une "sélection"...

Devons-nous pour autant considérer que la démocratie est pour nous, Iraniens, un luxe inaccessible ? Certainement pas. N'oublions pas que la démocratie a un processus de développement qui peut prendre des décennies pour entrer dans la vie quotidienne et dans la culture d'un pays. Une notion qu'il faut garder à l'esprit si l'on se risque à comparer la démocratie des sociétés occidentales dans lesquelles les progrès sociaux, économiques et culturels sont consolidés avec les formes de démocratie expérimentées par des pays sous-développés. Le combat pour la démocratie est un combat qui nécessite beaucoup d'investissements, tant culturels que socio-économiques. C'est un combat très long et à aucun moment il ne faut baisser les bras.

Chirin Ebadi, avocate iranienne, a reçu le Prix Nobel de la paix en 2003.


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vendredi 24 avril 2009

La diplomatie américaine entre ouverture et fermeté

Hillary Clinton a défendu mercredi l'amorce de dialogue avec l'Iran, Cuba et d'autres pays hostiles, mais la secrétaire d'Etat a critiqué «l'abdication» du Pakistan face aux talibans.
C'était risqué. En faisant de sa rivale à l'investiture démocrate pour l'élection présidentielle sa secrétaire d'État, Barack Obama s'exposait à une source de rivalité potentielle dans son premier cercle gouvernemental. Il faisait en même temps le choix raisonnable de s'associer une figure politique éminente, auréolée de son expérience acquise au Sénat et aux côtés de son mari à la Maison-Blanche pendant huit ans. En pleine crise économique, le président semblait vouloir se consacrer entièrement aux problèmes inté­rieurs, déléguant la diplomatie à son aînée, âgée de 61 ans.

En trois mois, Barack Obama a embrassé pleinement la politique étrangère américaine. Il a fait une entrée remarquée sur la scène internationale et se saisit quotidiennement des sujets d'actualité étrangers - trop, selon ses opposants. Hillary Clinton, elle, a adopté un profil discret, laissant le président établir une politique qu'elle applique sans fausse note. Interrogée mercredi par la commission des Affaires étrangères de la Chambre des représentants sur son opinion quant à la nécessité de dévoiler davantage de documents sur les techniques d'interrogations de la CIA, elle a répondu : «Je soutiendrai ce que décidera l'Administration.»

«Nous sommes toujours en train de faire le tri dans ce dont nous avons hérité et de chercher comment améliorer les choses. Le président engage le dialogue avec des gens qui refusaient de nous parler», a souligné la secrétaire d'État lors de cette première audition au Congrès depuis son entrée en fonction. Critiquée par l'opposition républicaine comme une «diplomatie des excuses», cette politique de la main tendue porte ses fruits, selon elle.

Marquer sa différence

Sa tirade la plus ferme a visé le Pakistan : «Je crois que le gouvernement abdique fondamentalement face aux talibans et face aux extrémistes», a-t-elle dit au sujet de l'application de la charia dans la vallée de la Swat (nord-ouest du pays). Sur l'Iran, la décision de l'Administration de participer désormais à toutes les réunions des six puissances impliquées dans les négociations sur le programme nucléaire iranien «nous donne plus de crédibilité et d'influence sur les autres pays», a souligné Mme Clinton. Promoteurs du dialogue, les États-Unis brandissent parallèlement la menace de sanctions en cas d'échec : «Nous sommes plus que prêts à tendre la main à l'Iran pour discuter, a-t-elle rappelé. Mais nous mettons tout en place pour les sanctions très sévères qui pourraient être nécessaires si nos offres étaient rejetées ou si le processus échouait.» La chef de la diplomatie s'est également dite prête à reprendre les discussions sur le nucléaire avec la Corée du Nord.

Avec Cuba, l'Administration Obama s'est efforcée en quelques semaines de mettre fin à des décennies d'isolationnisme, en assouplissant les restrictions de voyage dans l'île des émigrés cubains. «L'action du président a entraîné une réaction de Raul Castro et un débat interne avec son frère Fidel Castro. C'est un régime en bout de course », a justifié la secrétaire d'État. Aux reproches sur la poignée de mains échangée par Obama avec le président vénézuélien Hugo Chavez au Sommet des Amériques le week-end dernier, elle a répliqué : «Pourquoi aurait-on peur de serrer la main de quelqu'un ? Cela ne veut pas dire qu'on abandonne nos principes. Cela peut être une opportunité pour faire évoluer le président Chavez.»

Au Proche-Orient, Obama plaide, comme ses prédécesseurs, pour la création d'un État palestinien. Hillary Clinton a précisé mercredi que les États-Unis ne traiteraient avec un gouvernement palestinien englobant le Hamas que s'il renonçait à la violence et reconnaissait Israël.

Sur tous les sujets, le tandem Obama-Clinton tente de trouver un équilibre entre ouverture et fermeté. Si les objectifs ne diffèrent pas fondamentalement de ceux de l'Administration Bush, la nouvelle équipe en place à Washington a clairement marqué sa différence en abandonnant les doctrines passées des «axes du Mal» et de la guerre unilatérale contre la terreur.


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mercredi 22 avril 2009

La conférence de Durban II "pas du tout un échec", d'après Kouchner

PARIS (AFP) — La conférence sur le racisme ("Durban II") de Genève n'est "pas du tout un échec" malgré les "insanités antisémites" proférées par le président iranien Mahmoud Ahmadinejad, a estimé mardi le ministre français des Affaires étrangères Bernard Kouchner.


"Ce n'est pas du tout un échec mais le début d'un succès" a déclaré M. Kouchner sur Europe 1 en justifiant le choix de ne pas boycotter la conférence par les avancées contenues dans le projet de déclaration finale.

Malgré le départ des ambassadeurs de l4union europénne durant le discours du président Ahmadinejad lundi, "nous n'avons pas quitté la conférence, et nous y revenons", a-t-il dit.

Alors que la conférence de Durban I en 2001 avait vu un "déferlement de racisme", Durban II s'apprête à adopter "un texte où figure tout ce que nous souhaitions, tout ce que les pays occidentaux souhaitaient" même si "ce n'est pas parfait", a-t-il affirmé.

"Nous avons travaillé des années pour avoir ce texte, certains de nos amis ont été convaincus, ceux que l'on appelle les arabes modérés, au Moyen-Orient, et nous ne pouvions pas les abandonner", a-t-il encore plaidé.

"Dans ce texte (...) tout ce que nous voulions mentionner, c'est à dire l'antisémitisme, la discrimination sur les personnes, la liberté d'expression, le génocide a été mentionné, la mémoire de l'Holocauste, les droits des femmes ont été mentionnés, la traite des êtres humains, les personnes atteintes du VIH, les personnes handicapées", a poursuivi M. Kouchner.

Interrogé sur le fait que les discriminations envers les homosexuels ne figuraient pas dans le texte, il a reconnu que "ça on n'a pas pu, on le fera la prochaine fois".

Interrogé pour savoir pourquoi la France n'avait pas, comme les Etats-Unis, Israël et plusieurs pays européens, boycotté cette conférence, il a affirmé que "nous pouvions choisir comme les autres de faire le gros dos et de ne pas y aller" mais "la chaise vide, c'est facile et on s'en va et on crie sur les autres".

Il a a réaffirmé que le discours de M. Ahmadinejad, qui a provoqué un tollé international et amené les pays de l'UE présents à Genève à faire sortir de la salle leurs ambassadeurs, était "inadmissible" de par ses "insanités antisémites".

Toutefois "M. Ahmadinejad était prévisible, il y a 192 pays à l'ONU, on ne peut pas leur interdire de parler", a-t-il ajouté.

M. Kouchner s'est également démarqué des Etats-Unis, qui ont boycotté la conférence et vivement dénoncé les propos de M. Ahmadinejad, tout en assurant que cela ne remettait pas en cause leur volonté de dialogue avec Téhéran.

"C'est plus qu'un paradoxe, cela peut être vraiment une erreur", a-t-il dit. "Ils (l'administration de Barack Obama) ont dit que c'était un texte insupportable, inacceptable, scandaleux, donc on parle", a-t-il ironisé.

Le dialogue avec l'Iran est "un dialogue très difficile avec un pays qui en effet fabrique la bombe atomique et donc il faut faire tout pour qu'elle ne soit pas utilisée", a-t-il ajouté.



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Ahmadinejad joue "sa survie politique"

Pour Azadeh Kian, professeure de sciences-politiques à l'université Paris-VII et spécialiste de l'Iran, le discours du président iranien Mahmoud Ahmadinejad, lundi 20 avril à Genève, "s'adressait à la rue arabe" et visait "à détourner l'attention de l'électorat iranien", deux mois avant le scrutin présidentiel.

Le président iranien Mahmoud Ahmadinejad a qualifié Israël de "gouvernement raciste" à l'ouverture de la conférence de l'ONU à Genève cette semaine. Ce discours a provoqué le départ des délégations européennes et un véritable tollé dans l'opinion publique occidentale. A qui s'adressait-il ?
La diatribe négationniste de Mahmoud Ahmadinejad s'adressait clairement à la rue arabe. Elle visait avant tout les gouvernements qui ont accepté de signer la paix avec Israël, ainsi que le régime syrien de Bachar Al-Assad [alliée de l'Iran, la Syrie s'est engagée dans des négocations indirectes avec Israël par l'intermédiaire de la Turquie pour obtenir la rétrocession du plateau du Golan, annexé par les Israéliens en 1967]. Fidèle à lui-même, le président iranien s'est présenté comme le seul dirigeant musulman capable de tenir tête à Israël et aux Occidentaux. C'est là-dessus qu'il a assis sa popularité dans le monde arabe, y compris au Maghreb. Mais pour beaucoup d'Iraniens, cette rhétorique dessert les intérêts de la république islamique.

A deux mois de l'élection présidentielle, quelle portée ce discours peut-il avoir sur l'électorat iranien ?


Pendant la campagne électorale de 2005, Ahmadinejad s'était surtout concentré sur les questions économiques. Il avait promis une amélioration générale des conditions de vie dans le pays, mais, quatre ans après, son bilan est catastrophique. Le chômage et l'inflation ont beaucoup augmenté malgré une hausse considérable des prix du pétrole. Cette situation calamiteuse a été accentuée par les sanctions [économiques] internationales. Les Iraniens reprochent au président d'avoir dépensé des milliards de dollars pour venir en aide aux groupes palestiniens et au Hezbollah libanais plutôt que de favoriser la création d'emploi dans le pays. Conscient de ces handicaps, Mahmoud Ahmadinejad a cherché à détourner l'attention de l'électorat en l'orientant vers des questions régionales. Il a voulu radicaliser le ton de la campagne pour forcer ses détracteurs à prendre position pour ou contre Israël.

Ses positions reflètent-elles celles des plus hautes instances du pouvoir en Iran ?

Non. Le président iranien se sent et se sait lâché par les conservateurs. Sa survie politique ainsi que celle de la faction ultra repose sur une stratégie de la tension permanente. La menace israélienne de bombarder les centrales nucléaires iraniennes joue en faveur de ces positions. Mais en cas de normalisation des relations avec les Etats-Unis et Israël, Ahmadinejad et ses partisans n'ont politiquement plus aucune raison d'être.

Il a pourtant dit "accueillir positivement" la main tendue du président américain Barack Obama. A-t-il infléchi son discours vis-à-vis des Etats Unis ?

D'après les sondages effectués récemment en Iran, 70 % de la population est favorable au rétablissement des relations avec les Etats-Unis. Seule une petite minorité d'intégristes s'y oppose. Ahmadinejad ne peut pas aller à l'encontre de cela. Mais il ne s'attendait pas à ce que Barack Obama soit élu et il ne s'y est pas préparé. Aujourd'hui, il est plutôt en dehors du processus de négociations avec les Etats-Unis. D'après mes informations, le guide de la révolution iranienne a préféré mobiliser ses propres conseillers auprès du président américain. La rhétorique très radicale d'Ahmadinejad est donc également un défi lancé aux plus hautes instances du pouvoir iranien. L'ayatollah Ali Khamenei n'a jamais eu de discours négationniste.

Propos recueillis par Elise Barthet





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mardi 21 avril 2009

L'UE réclame la libération de la journaliste condamnée à de la prison en Iran

La présidence de l'Union européenne a réclamé, lundi 20 avril, la libération de la journaliste irano-américaine Roxana Saberi, condamnée par la justice iranienne à huit ans de prison pour espionnage, estimant qu'elle n'avait pas eu droit à un "procès juste et transparent".

Agée de 31 ans, Roxana Saberi a été jugée le 13 avril puis condamnée à huit ans de prison pour espionnage, au profit notamment des Etats-Unis. Née aux Etats-Unis d'un père iranien et d'une mère américaine, Roxana Saberi avait choisi de vivre à Téhéran et travaillait depuis 2002 comme pigiste pour des médias anglo-saxons. Les autorités iraniennes l'auraient d'abord accusée d'avoir acheté une bouteille de vin dans ce pays où le commerce et la consommation d'alcool sont interdits.

Le président américain Barack Obama avait déjà demandé sa libération, dimanche, se disant "absolument certain qu'elle n'était impliquée dans aucune sorte d'activité d'espionnage".

TÉHÉRAN PROMET UN PROCÈS D'APPEL "RAPIDE ET JUSTE"


Comme en écho à cette demande, le pouvoir judiciaire iranien a réclamé que la procédure d'appel soit "rapide et juste". Dimanche, le président iranien, Mahmoud Ahmadinedjad, avait demandé au procureur de Téhéran de faire "le nécessaire pour assurer le respect de la justice et l'exactitude dans l'examen des accusations" portées contre Mme Saberi.

Lundi, la chef de la diplomatie américaine, Hillary Clinton, a exprimé l'espoir que "ces déclarations conduiront à des actes". "Nous pensons qu'elle devrait être libérée immédiatement, que les accusations à son encontre sont sans fondement et qu'elle a été soumise à un processus opaque, imprévisible et arbitraire", a indiqué Mme Clinton.

Le père de Roxana, Reza Saberi, avait affirmé samedi, en apprenant sa condamnation, qu'elle avait été incitée par les enquêteurs à faire de faux aveux de culpabilité contre l'engagement, non tenu, d'être rapidement libérée.

Tokyo a offert pour sa part de jouer un rôle de "médiateur" dans l'affaire, "vu que le Japon a des relations chaleureuses avec l'Iran".
A Téhéran, le porte-parole de la diplomatie, Hassan Ghashghavi, a réfuté l'idée que Roxana Saberi pourrait servir de monnaie d'échange pour la libération de trois Iraniens arrêtés par les forces américaines en Irak en janvier 2007.



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Sommet de l'ONU - Ahmadinejad attaque Israël, la France quitte la salle

Le dérapage tant redouté a bien eu lieu. Lors de la conférence Durban 2 contre le racisme, qui se tient à Genève, le président iranien Mahmoud Ahmadinejad, dont la venue à ce sommet a provoqué de nombreuses défections dans les délégations internationales, a une nouvelle fois suscité la polémique.

Déjà, à peine arrivé à la tribune, alors que le leader iranien s'apprête à prendre la parole, il doit s'interrompre. Trois manifestants déguisés avec des perruques multicolores et des nez rouges de clown surgissent du fond de la salle et crient "Raciste ! raciste !" à l'adresse de l'orateur. Ils jettent sur lui un objet non identifié avant de se faire expulser par les gardes de l'ONU. "Pardonnez-leur", lance Mahmoud Admadinejad, visiblement amusé par l'incident, à la salle redevenue silencieuse.
Et puis vient son discours. "Au nom clément et miséricordieux. Nous remercions dieu tout puissant..." Une entame de plusieurs minutes aux accents pour moins inhabituels dans des cercles diplomatiques, qui finit par agacer la salle où le brouhaha s'installe. Mais très vite, Mahmoud Ahmadinejad capte l'attention.

Le président iranien critique l'établissement d'un "gouvernement raciste" au Proche-Orient après 1945, faisant clairement allusion à Israël. "Après la fin de la Seconde Guerre mondiale, [les alliés] ont eu recours à l'agression militaire pour priver de terres une nation entière sous le prétexte de la souffrance juive", explique Mahmoud Ahmadinejad. "Ils ont envoyé des migrants d'Europe, des États-Unis et du monde de l'holocauste pour établir un gouvernement raciste en Palestine occupée", affirme-t-il. Des clameurs s'élèvent alors de l'assistance, et l'ambassadeur de France auprès de l'ONU à Genève, Jean-Baptiste Mattéi, se lève et quitte la salle.

Un geste immédiatement imité par les 22 autres représentants d'États de l'Union européenne présents. Selon plusieurs sources diplomatiques, les Européens s'étaient mis d'accord sur ce coup d'éclat avant le début de la conférence en cas de dérapage iranien.
Plus tôt dans la journée, le chef de la diplomatie française Bernard Kouchner avait prévenu : "Aucun dérapage, aucune provocation" ne seront tolérés. "Si le président (iranien) Ahmadinejad veut rouvrir le texte qui a été difficilement accepté ou s'il profère des accusations racistes ou antisémites, nous quitterons la salle immédiatement. Nous ne tolérerons aucun dérapage, aucune provocation", avait-il souligné lundi matin sur France Info. "Je souhaite que ce geste de protestation suscite une prise de conscience au sein de la communauté internationale", a estimé Bernard Kouchner après l'incident. "La protection des droits de l'homme et la lutte contre toutes les formes de racisme sont trop importantes pour que les nations ne s'unissent pas contre tous les discours de haine, contre tous les dévoiements", a-t-il estimé.

Même tonalité du côté de l'Élysée. Le discours prononcé par le président iranien constitue un "appel intolérable à la haine raciste" et "il bafoue les idéaux et les valeurs inscrites dans la déclaration universelle des droits de l'homme", a déclaré Nicolas Sarkozy. Le chef de l'État, "qui avait déjà rejeté des propos inacceptables tenus en d'autres circonstances par le président iranien, condamne totalement ce discours de haine", dit le communiqué de la présidence française, dans lequel Nicolas Sarkozy "appelle à une réaction d'une extrême fermeté de l'Union européenne".


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lundi 20 avril 2009

La présidence iranienne intervient dans l'affaire Roxana Saberi

Le président iranien Mahmoud Ahmadinejad a appelé dimanche à ce que la journaliste américano-iranienne condamnée pour espionnage puisse bénéficier d'une véritable défense lors de la procédure en appel, selon l'agence officielle de presse IRNA.

La journaliste Roxana Saberi, 31 ans, a été condamnée à huit ans de prison pour espionnage au profit des Etats-Unis. Son avocat a annoncé qu'il comptait faire appel.

L'agence cite une lettre des services de la présidence adressée au procureur de la république d'Iran, Saeed Mortazavi.

Dans cette lettre, il est demandé au procureur de s'assurer personnellement de ce que les "suspects bénéficient de tous leurs droits juridiques pour se défendre" des accusations portées contre elles. "Préparez les étape de la procédure (...) pour que la justice soit respectée", continue IRNA, citant des passages de la missive.

L'affaire Saberi intervient à l'heure où la nouvelle administration américaine tente d'inverser la tendance dans les relations avec Téhéran, se disant prête à entamer des discussions, principalement sur la question du nucléaire iranien. Le président Ahmadinejad a lui aussi de son côté envoyé le signal le plus clair à ce jour qu'il est favorable à une reprise de contact.

La présidence évoquait également le cas du blogueur irano-canadien Hossein Derakhshan, en prison depuis novembre pour insulte à l'islam. Il est considéré comme un des artisans de l'explosion du phénomène Internet en Iran, en expliquant sur Internet, très simplement et en farsi, comment créer des sites.

Samedi, le père de la jeune femme, Reza Saberi, avait déclaré sur les ondes de la radio publique américaine NPR que sa fille n'avait pas pu bénéficier d'une défense digne de ce nom au cours de son procès, qui n'a duré qu'une seule journée et s'est déroulé à huis clos, lundi.

"Le procès n'était pas bien sûr un vrai procès", a-t-il déclaré par ailleurs sur CNN, expliquant qu'il n'avait dure que 15 minutes. "Quelques minutes après son ouverture, elle ne savait toujours pas qu'il s'agissait d'un procès".

Il avait précisé sur NPR que sa fille, qu'il a décrite comme étant "assez déprimée", avait été condamnée mercredi, soit deux jours après sa comparution. Et que le tribunal avait attendu samedi pour en informer les avocats. AP


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dimanche 19 avril 2009

L'armée israélienne se tient prête à lancer des frappes aériennes sur l'Iran

D'après le quotidien The Times l'armée israélienne se tient prête à lancer des frappes aériennes de grande ampleur sur les installations nucléaires iraniennes au cas où le gouvernement lui en donnerait l'ordre. Dans son édition du samedi 18 avril, le quotidien britannique indique, citant des sources israéliennes qu' "Israël veut être sûre que si son armée recevait le feu vert, elle pourrait frapper l'Iran en quelques jours, ou même heures". "Elle se prépare sur tous les niveaux à cette éventualité. Le message à l'Iran est que la menace n'est pas seulement verbale", indique un haut responsable de la défense israélienne.

Parmi les mesures de préparation, Israël doit acquérir trois avions radars Awacs et envisage des exercices à l'échelle nationale pour préparer la population à d'éventuelles représailles.

Les responsables israéliens estiment que plus d'une douzaine de cibles devraient être visées en Iran, dont des convois mobiles. Les sites visés incluent Natanz (est), où plusieurs milliers de centrifugeuses enrichissent de l'uranium, Ispahan (centre) où des tunnels abritent 250 tonnes de gaz et Arak (est) où l'Iran construit un réacteur à eau lourde.

"Nous ne proférerions pas de menace (envers l'Iran) sans avoir les moyens de les réaliser. Il y a eu récemment un progrès, plusieurs opérations de préparation, qui indiquent une volonté de la part d'Israël d'agir", a indiqué un responsable lié au renseignement au Times.
Cependant, il est peu probable qu'Israël lance des frappes sans recevoir au moins un accord tacite de l'adminsitration américaine, qui vient d'adopter un ton plus conciliant envers Téhéran, souligne cette source.


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samedi 18 avril 2009

Une journaliste irano-américaine [Roxana Saberi]condamnée à huit ans de prison en Iran

La journaliste irano-américaine Roxana Saberi, jugée cette semaine en Iran pour espionnage au profit des Etats-Unis, a été condamnée à huit ans de prison, a annoncé samedi 18 avril un proche de la famille sous couvert de l'anonymat.

Le procès de la journaliste, âgée de 31 ans et détenue depuis fin janvier à Téhéran, s'était ouvert lundi dernier devant le tribunal révolutionnaire de la capitale, sur l'inculpation d'espionnage pour le compte des Etats-Unis. L'avocat de la journaliste, Abdolsamad Khoramshahi, joint par l'AFP a dit ne pas pouvoir s'exprimer dans l'immédiat. Le procès avait duré une journée seulement. "La journaliste a été autorisée à s'exprimer devant le tribunal pour sa défense", avait déclaré mardi le porte-parole de la Justice, Ali Reza Jamshidi. Selon lui, Melle Saberi était accusée d'"espionnage pour le compte de l'étranger, (...) des Etats Unis". "Il y a toujours un espoir. Mais nous ne savons pas ce qui va se passer", avait dit pour sa part le père de la journaliste.

Cette condamnation est survenue en dépit des ouvertures diplomatiques du président américain, Barack Obama, et de Hillary Clinton, la secrétaire d'Etat sur la République islamique. Hillary Clinton avait indiqué fin mars qu'une délégation américaine avait remis à une délégation iranienne une lettre demandant la libération de trois Américains détenus en Iran, dont Melle Saberi, en marge d'une conférence sur l'Afghanistan à La Haye. Le porte-parole de la diplomatie iranienne Hassan Ghashghavi avait démenti qu'une telle rencontre ait eu lieu et qu'une lettre ait donc été remise.

Roxana Saberi, 31 ans, détient la double nationalité américaine et iranienne mais l'Iran ne reconnaît pas le principe de la double nationalité. La jeune journaliste, qui collabore notamment à la radio publique américaine NPR, la BBC et la chaîne de télévision américaine Fox News, avait initialement été détenue pour achat d'alcool, interdit dans la République islamique.
En mars, les autorités ont indiqué que sa carte de presse lui avait été retirée en 2006, et que depuis elle travaillait "illégalement" en Iran.


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vendredi 17 avril 2009

Roxana Saberi jugée comme espionne en Iran

Le procès de la journaliste irano-américaine, inculpée d’espionnage au profit des Etats-Unis, a débuté lundi devant un tribunal révolutionnaire. Roxana Saberi est détenue à Téhéran depuis fin janvier, initialement pour avoir acheté de l’alcool, ce qui est interdit dans la République islamique.

La semaine dernière, le vice-procureur de Téhéran, Hassan Hadad, avait annoncé son inculpation pour espionnage: «Elle n’avait pas d’accréditation de presse et menait des activités d’espionnage sous couvert de journalisme.»

Sa carte de presse lui ayant été retirée en 2006, elle travaillait selon eux «illégalement» en Iran, pays qui ne reconnaît pas la double nationalité. Roxana Saberi, qui collabore avec la radio publique américaine NPR, la BBC et Fox News, a reçu le soutien de l’administration Obama, sans succès. Les exhortations à la libération de Robert Wood, porte-parole du département d’Etat, selon lequel ces accusations étaient «sans fondement», n’ont servi à rien.

La décision du juge devrait intervenir dans une semaine, selon les informations dont dispose son père. Le porte-parole de la justice iranienne, Ali Reza Jamshidi, a précisé que la journaliste a été «autorisée à s’exprimer devant le tribunal pour sa défense».


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jeudi 16 avril 2009

Les Occidentaux rouvrent avec prudence des pourparlers avec l'Iran

Les Occidentaux et l'Iran sont dans une phase d'ouverture et d'observation : les premiers ont accueilli avec retenue mais scepticisme les annonces faites, le 9 avril, par le président iranien, Mahmoud Ahmadinejad, sur les nouveaux progrès qu'aurait accomplis Téhéran dans son programme nucléaire. Les dirigeants iraniens, de leur côté, se sont déclarés prêts à répondre favorablement à la proposition américaine d'engager de nouvelles discussions.

"Les conditions ont changé", a expliqué M. Ahmadinejad, tandis que son proche conseiller, Ali Akbar Javanfekr, parlait d'une "proposition constructive et d'un changement d'attitude" de Washington. Javier Solana, haut représentant de l'Union européenne pour la politique de sécurité et de défense, devrait avoir dans les prochains jours un premier contact téléphonique avec Saïd Jalili, le négociateur du dossier nucléaire iranien, avant qu'une première rencontre soit organisée entre les représentants des "Six" (Allemagne, Chine, Etats-Unis, France, Royaume-Uni et Russie), et l'Iran.

La prudence des Américains et des Européens est nourrie par l'ambivalence, habituelle, du discours iranien : à Ispahan, le président Ahmadinejad a souligné que les négociations passées avec les Occidentaux ont échoué parce que ceux-ci "insistaient sur l'arrêt de nos activités pacifiques", une référence indirecte au processus d'enrichissement de l'uranium, dont les Occidentaux exigent l'arrêt. En inaugurant la "première usine de fabrication de combustible nucléaire", il a annoncé que 7 000 centrifugeuses (contre 6 000 fin février) ont été installées à l'usine d'enrichissement de Natanz, et indiqué que deux nouveaux types de centrifugeuses, "d'une capacité plusieurs fois supérieure à celles existantes", ont été testées. Il s'agit vraisemblablement des centrifugeuses de nouvelle génération IR-2 et IR-3, évoquées par l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) dans son rapport du 19 février.



"CONJONCTION FAVORABLE"



Tournant à vitesse élevée, ces appareils ont pour fonction d'enrichir l'uranium : faiblement enrichi, celui-ci sert de combustible pour une centrale nucléaire civile ; fortement enrichi, il concourt à la fabrication d'une arme nucléaire. Ces trois "avancées" sont a priori contradictoires avec l'état d'esprit d'ouverture professé par M. Ahmadinejad, mais les experts occidentaux restent prudents. "L'Iran, a rappelé, à Washington, un porte-parole du département d'Etat, a déjà, dans le passé, annoncé qu'il faisait fonctionner des quantités de centrifugeuses ne correspondant pas aux estimations de l'AIEA."

Ce qui préoccupe les diplomates qui suivent ce dossier, c'est moins les rodomontades iraniennes que le risque de voir l'Iran réamorcer un processus de négociations, qui s'est révélé stérile dans le passé. "Pendant des mois il ne s'est rien passé, résume un expert, si ce n'est le même jeu iranien pour gagner du temps, avec la même menace de sanctions, et les mêmes réponses iraniennes dilatoires." "Il est normal, ajoute-t-il, que les Américains se réengagent : ils ont un nouveau président, la période électorale en Iran est une occasion qu'il faut utiliser, et la crise économique, qui oblige les Iraniens à pomper dans leurs réserves financières, incite Téhéran à réagir. C'est donc une conjonction favorable."

Les Européens ont le sentiment d'avoir déjà offert à l'Iran toutes les compensations financières pour l'inciter à renoncer à son programme d'enrichissement. Tout en accompagnant la volonté de l'administration Obama de rouvrir des négociations avec Téhéran, ils préparent donc de nouvelles sanctions : dans un premier temps, il pourrait s'agir de soumettre à autorisation toute transaction commerciale avec l'Iran, avant de passer, si nécessaire, à l'interdiction totale des opérations bancaires.

De telles mesures sont cependant considérées comme l'"arme ultime" en matière économique. Pour une raison simple : les entreprises européennes qui exportent vers l'Iran, devront, elles aussi, faire des sacrifices.

Laurent Zecchini



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mercredi 8 avril 2009

Iran-Etats-Unis : les discussions secrètes de Genève

Depuis six ans, des chercheurs américains, européens et iraniens se rencontrent en secret. Les réunions, sauf deux, ont eu lieu à Genève. Objectif: établir des ponts informels pour éviter le pire. Ce processus, baptisé "Track II", révélé aujourd'hui[Le sept Avril 2009] par le quotidien suisse Le Temps, s'inspire des accords d'Oslo.

La diplomatie informelle va-t-elle permettre aux Iraniens et aux Américains de se réconcilier, 30 ans après la rupture des relations diplomatiques entre Washington et Téhéran ? Depuis six ans, des universitaires de la République islamique d'Iran et des Etats-Unis, mais aussi d'Europe, de Suisse, d'Etats arabes voire même d'Israël font fi des blocages et se réunissent régulièrement en Europe. Plusieurs réunions, qui comptent en moyenne une trentaine de participants, ont eu lieu à Genève. Les deux dernières se sont tenues en toute discrétion dans un autre pays européen. La plus récente a été organisée du 6 au 8 mars.

Soutien de Washington et de Téhéran

Les participants à ces rencontres appellent ce processus "Track II" (Piste II), un terme pour évoquer une diplomatie informelle et secrète. Un professeur, qui participe à ces réunions, mais qui souhaite conserver l'anonymat de peur de perdre son travail, témoigne: "Le processus d'Oslo a commencé à ce niveau. Entre Iraniens et Occidentaux, il est essentiel de se parler, car les perceptions qu'on peut avoir des uns et des autres sont parfois très éloignées de la réalité. Le pire, c'est de se déshumaniser réciproquement." Et le professeur d'ajouter: "Quand il n'y a pas de caméras, les peurs de parler librement disparaissent. Les participants ne se sentent pas contraints de jouer un jeu."

La diplomatie informelle de Track II n'est pas déconnectée de la politique officielle de Washington et de Téhéran. Elle s'effectue avec un soutien en haut lieu. Lors de la dernière réunion, qui s'est déroulée au début mars, un proche du gouvernement iranien était présent, de même qu'un ambassadeur d'un autre Etat. Ce dialogue semble avoir l'aval du Conseil du discernement iranien et de l'ex-président Ali Akbar Hachemi Rafsandjani. Les fuites dont Le Temps se fait l'écho apparaissent dès lors comme une volonté d'influer sur la campagne qui mènera à l'élection présidentielle iranienne du 12 juin. Cette transparence semble aussi révéler l'urgence de la situation : Téhéran serait sur le point d'atteindre le seuil nucléaire.

Profil pointu

Le profil des professeurs d'université est en lien avec les problématiques régionales du Proche-Orient et les relations américano-iraniennes. Certains sont des spécialistes de stratégie, d'autres des relations internationales. D'autres encore sont des experts nucléaires ou travaillent pour des organisations internationales. Quelques-uns d'entre eux conseillent des responsables politiques. Un participant qui souhaite également garder l'anonymat le concède: "Certains professeurs iraniens croient dur comme fer au processus en cours. En participant à Track II, ils risquent néanmoins de mettre leur vie en jeu." Apparemment, quelques professeurs dont le nom est apparu dans des journaux grecs voici quelques années ont fini en prison.

Le professeur pense que le processus de Track II comporte un autre avantage. "En Iran, les décisions se prennent par consensus. Il est difficile de l'extérieur d'identifier qui sont les vraies personnes de pouvoir. Par nos discussions entre universitaires, nous sommes plus à même de savoir qui sont les vrais décideurs. Parfois, une personne n'a peut-être aucun titre, mais elle a un accès privilégié à ceux qui décident vraiment."

Les préoccupations sur le programme nucléaire iranien


Si les universitaires qui se réunissent ne traitent pas directement du problème nucléaire iranien, ils n'éludent pas la question pour autant. Lors de la rencontre du 6-8 mars, deux points de vue se sont fait jour. Les uns défendaient l'idée qu'il valait mieux traiter de la controverse nucléaire séparément et ne pas l'associer à d'autres problématiques. D'autres en revanche ont plaidé pour négocier un "paquet global", comme ce fut le cas avec la proposition de l'Union européenne et de son représentant Javier Solana de "gel des sanctions contre gel du programme d'enrichissement d'uranium". D'autres questions ont été soulevées: que faire d'un Etat comme l'Iran qui est sur le point de franchir le seuil nucléaire? Selon nos sources, Téhéran dispose aujourd'hui de 4000 centrifugeuses et de 800 kilos d'uranium légèrement enrichi (LEU). Il faut 10 kilos d'uranium hautement enrichi pour faire une bombe. Le régime est-il en train de se militariser? Quel impact aurait un changement de président lors de l'élection du 12 juin prochain?

Les incertitudes américaines

Lors de la réunion de Track II de mars 2009, les Iraniens étaient moins présents que lors des précédents rendez-vous. Raison: ils semblent attendre les effets concrets du changement promis par l'administration américaine de Barack Obama. Selon nos informations, Washington devait achever la révision de sa politique iranienne à la fin mars. Les Américains s'interrogent. Faut-il continuer avec l'approche multilatérale du P 5+1 puissances négociatrices (Etats-Unis, France, Royaume-Uni, Chine, Russie et Allemagne) ou faut-il au contraire privilégier la voie bilatérale avec les Iraniens? Au sein de l'administration américaine, les rivalités internes font traîner les choses. Directeur politique des Etats-Unis au sein du P 5+1, William Burns, qui était aux pourparlers de Genève en juillet 2008 (diplomatie formelle, Track I) avec les Iraniens, est confronté à la concurrence de Richard Holbrooke et surtout de Denis Ross, un ancien de l'administration Clinton, qui a été nommé envoyé spécial pour le Proche-Orient. "Mais qui est en charge du dossier ? se demande un expert, qui rappelle qu'à Téhéran, Denis Ross est perçu comme un dur. C'est un peu comme si on envoyait un gardien de la Révolution négocier à Washington."

Complicité organisée

Pour l'heure, les réunions de Track II ne se tiennent plus à Genève. Motif ? Avec l'intense activité diplomatique qui caractérise la Cité de Calvin, la discrétion n'est plus assurée. Mais il n'est pas exclu qu'en fonction de l'évolution des relations américano-iraniennes et du succès relatif de Track II, ce type de rencontres informelles puisse devenir plus médiatique et revenir à Genève. Cette hypothèse serait encore plus vraisemblable si la diplomatie d'ouverture de l'administration Obama envers l'Iran commençait à produire des résultats.

Jusqu'ici, quelque 400 universitaires ont pris part à ces réunions. Le contexte dans lequel elles se déroulent rappelle le cadre des négociations secrètes d'Oslo relatives au conflit israélo-arabe. Les participants choisissent un lieu discret, de préférence en pleine campagne, où les distractions sont peu nombreuses. Des petits groupes se forment et discutent de problèmes pointus. Souvent, les universitaires continuent leur discussion lors de balades dans la nature. Les participants aux réunions, qui durent en général trois jours, passent tout leur temps ensemble : du petit déjeuner au dîner afin de créer une quasi-complicité plus propice à la quête de solutions.

Les limites de la realpolitik

Difficile à ce jour de savoir si ce processus de diplomatie informelle va déboucher sur un accord entre les Etats-Unis et la République islamique. Un expert pense toutefois que le soutien des autorités iraniennes est relativement mou: "L'Etat, en Iran, est omniprésent. On peut douter qu'elles accordent trop d'importance au processus. Mais ce qui leur plaît, c'est qu'on parle du pays." "Cela prouve que nous sommes pris au sérieux", aurait avancé un haut responsable iranien.

Le processus de Track II a cependant le mérite de rompre avec les canaux officiels et la realpolitik qui n'offrent qu'une faible marge de manœuvre. D'autant que les Etats-Unis n'ont plus de contact direct avec l'Iran depuis trente ans et que leur président George W. Bush inscrivit la République islamique sur l'"Axe du mal" dans son discours sur l'état de l'Union en janvier 2002. Les premières discussions de Track II paraissent coïncider avec le début de la guerre en Irak en mars 2003 quand Mohammad Khatami était encore président.
Aujourd'hui, bien que la présidence iranienne soit occupée depuis 2005 par l'ultra-conservateur Mahmoud Ahmadinejad, Track II continue…

Stéphane Bussard (Le Temps.ch)


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Si Téhéran remplaçait ses peintures murales antiaméricaines...

Si la fameuse peinture de Mehdi Qadyanloo Down with the USA ("Mort à l'Amérique") dans le centre de Téhéran pouvait être remplacée par une nouvelle fresque symbolisant la paix, ce serait une véritable révolution, estime l'artiste iranien.

L'immense peinture murale, montrée sur les télévisions du monde entier, couvre un pan d'un bâtiment d'une dizaine d'étages dans le centre-ville, avenue Karim-Khan. Elle représente un drapeau américain dont les étoiles sont transformées en crânes et les lignes rouges se terminent en bombes. "Je veux remplacer cette peinture murale par une nouvelle peinture symbolisant la paix", affirme M. Qadyanloo.

Son rêve peut devenir réalité car les autorités municipales ont lancé depuis plusieurs mois une campagne d'embellissement de la ville, notamment par de nouvelles peintures représentant la culture iranienne mais aussi un message de paix et d'espoir. "L'idée est de rendre la capitale, polluée et encombrée, plus vivable avec des peintures ayant des thèmes plus universels", confirme Mohammad Reza Sharif Kazemi, l'homme chargé à la mairie de Téhéran d'embellir la ville.

"Il est normal de montrer à travers les peintures murales l'ancienne dictature [monarchique] ou la guerre (...) mais aujourd'hui la nation est en progrès et nous devons donner un nouveau message pour la nouvelle génération. Nous devons également montrer la profondeur de la culture iranienne", ajoute-t-il. Un débat qui intervient au moment où Iraniens et Américains multiplient les signes d'apaisement. Le rapprochement américano-iranien passera-t-il par les murs de la capitale ?


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Prison confirmée pour 2 médecins

La justice iranienne a confirmé les peines de six et trois ans de prison infligées à deux médecins iraniens accusés d'avoir participé à un complot contre le régime islamique soutenu par la CIA américaine, a déclaré mardi à l'AFP leur avocat.

"Lors d'une session extraordinaire le 18 mars, la cour d'appel a malheureusement confirmé le jugement", a déclaré à l'AFP Massoud Shafiie, qui a critiqué la précipitation avec laquelle cette instance avait rendu sa décision.

Arash Alaie a été condamné à six ans de prison et Kamiar Alaie à trois ans de prison.
L'arrestation en juin des médecins, des frères connus à l'étranger pour leur lutte contre le virus du sida, avait été rendue publique en juillet par des ONG américaines.

Le directeur du contre-espionnage du ministère des Renseignements iranien avait affirmé en janvier que les deux médecins faisaient partie d'un groupe de quatre personnes condamnées à des peines de prison pour collaboration avec les renseignements américains dans le but de renverser pacifiquement le régime islamique.

La justice iranienne avait annoncé la semaine dernière que les quatre personnes appartenaient à un réseau "lié à la CIA".
Les autorités iraniennes accusent régulièrement les Etats-Unis et la Grande-Bretagne de chercher à renverser le régime islamique. Elles ont accentué depuis plus d'un an leur répression à l'encontre d'Iraniens accusés de contribuer à ces efforts.


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lundi 6 avril 2009

Une rencontre Obama-Khatami ?

Deux participants très attendus seront présents, ces lundi et mardi, au deuxième Forum de l'Alliance des civilisations de l'ONU, qui se tiendra à Istanbul.

Tous deux défenseurs d'un dialogue entre l'Occident et l'Orient, Barak Obama, le Président américain et Mohammad Khatami, l'ex-Président iranien devraient chacun y présenter un discours.

Aucun entretien officiel n'est prévu, les deux pays ayant rompu leurs relations diplomatiques depuis 1979.

Mais la presse turque commence déjà à spéculer sur la possibilité d'une discrète rencontre entre les deux hommes (voir ici l'article du quotidien turc Hurryiet, repris par la télévision iranienne Press TV ) en marge de ce forum qui réunit des chefs d'Etats et de gouvernement, ainsi que des ministres des Affaires étrangères de 27 pays.

Fin mars, Obama s'est fait remarquer par sa main tendue à Téhéran, à l'occasion d'un message adressé à Téhéran lors du nouvel an iranien, le Nowrouz. Un message qu'il pourra, sans doute, réitérer à Mohammad Khatami.

Mais l'ex-Président iranien, qui dirige aujourd'hui le Centre du dialogue entre les Civilisations - et qui vient de retirer sa candidature aux élections présidentielles du mois de juin prochain - ne pèse plus grand-chose sur l'échiquier politique iranien.

En matière de géopolitique, le dernier mot revient à l'ayatollah Khamenei, le guide suprême, qui, seul, a la possibilité de trancher sur ce sujet (comme le suggère cette caricature croustillante du dessinateur Patrick Chappatte) que je livre à votre réflexion. « Facebook friends » ? Ce n'est pas encore pour demain...
Delphine Minoui


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jeudi 2 avril 2009

Compte rendu : Premiers contacts entre Américains et Iraniens à la conférence sur l'Afghanistan

Même absent, le président américain, Barack Obama, aura pesé sur les discussions des quatre-vingts délégations présentes à la conférence internationale sur l'Afghanistan, mardi 31 mars, à La Haye. Première réunion de ce genre depuis son entrée à la Maison Blanche, organisée quatre jours après l'annonce de sa nouvelle stratégie en Afghanistan et peu avant le sommet de l'OTAN qui évoquera l'approche militaire de l'Alliance dans ce pays, elle a marqué le début "d'un nouveau commencement", selon la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton.

Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a salué "le changement qualitatif de la position américaine", mais a néanmoins assuré que le temps était compté et que l'année 2009 serait "cruciale" pour l'Afghanistan. Le ministre français des affaires étrangères, Bernard Kouchner, qui s'est félicité de voir les Etats-Unis venir sur des positions défendues par la France, a estimé qu'il ne restait "que quelques mois pour réussir".

La mise en place d'une stratégie régionale semble désormais moins relever du voeu pieu. L'Iran, c'est une première, a envoyé à La Haye son vice-ministre des affaires étrangères, Mohammed Mehdi Akhoundzadeh. Selon ce dernier, "la coopération régionale doit être la priorité et le rôle de l'ONU doit être plus grand que jamais". Un discours relevé par Hillary Clinton, pour qui "les déclarations du représentant iranien sont prometteuses". La secrétaire d'Etat américaine a également souligné l'importance d'un "partenariat avec le Pakistan" : "Il est essentiel. Lui seul nous permettra de progresser, notamment pour lutter contre les sanctuaires qui hébergent les insurgés. Mais, pour cela, il faut donner à ce pays les moyens dont il a besoin".

Mme Clinton a enfin insisté sur le principe d'une amnistie pour les insurgés qui renonceraient à la violence et rompraient avec Al-Qaida. Cette proposition, qui avait été faite dès 2005 par le président afghan Hamid Karzaï, est reprise dans le communiqué final de la conférence. Ce texte souligne également la nécessité d'"éliminer les sanctuaires d'Al-Qaida et d'autres réseaux terroristes, où qu'ils soient", une précision qui semble valoir pour les zones tribales pakistanaises.

La secrétaire d'Etat américaine a, d'autre part, invité tous les pays à participer, le 17 avril, à la conférence des "amis du Pakistan", à Tokyo, qui abordera le soutien financier à un pays dont la fragilité économique constitue, selon elle, une menace aussi dangereuse pour l'avenir de la région que le terrorisme.

Le ministre des affaires étrangères du Pakistan, Shah Mehmoud Qureshi, a confirmé le besoin d'un tel soutien et s'est félicité, par ailleurs, d'accueillir, à Islamabad, les 13 et 14 mai, la troisième conférence régionale de coopération économique consacrée à l'Afghanistan. Le président Karzaï a confirmé que "sans coopération" avec son voisin pakistanais "rien ne serait possible dans la région", insistant sur le "rôle clé" joué par la Turquie pour faciliter ce dialogue.

L'autre point de convergence a porté sur la capacité des autorités afghanes à prendre en main leur destin. En premier lieu la lutte contre la corruption : "A long terme, elle est aussi nocive pour l'Afghanistan qu'Al-Qaida, a prévenu Mme Clinton, car elle facilite le recrutement des nouveaux insurgés." Les talibans profitent en effet du ressentiment de la population contre le gouvernement de Kaboul. Pour consolider l'Etat afghan, les Etats-Unis veulent augmenter "dans les prochaines années" les effectifs de l'armée afghane jusqu'à 134 000 soldats et porter ceux de la police à 82 000 unités.

Enfin, l'accent a été mis sur la coordination de l'aide. "Il faut cartographier l'aide internationale, savoir qui fait quoi", a souligné M. Kouchner. "Les Etats eux-mêmes ne savent pas ce qu'ils envoient en Afghanistan", assure Pierre Lellouche, l'émissaire français pour l'Afghanistan et le Pakistan. Selon Kai Eide, le représentant spécial de l'ONU pour l'Afghanistan, "les pays doivent accepter que leur aide soit subordonnée, peu sont prêts à l'accepter".

La volonté générale de voir l'ONU jouer un rôle accru en Afghanistan avait été formulée à Paris en juin 2008, lors de la conférence des donateurs pour l'Afghanistan, sans effet notable. La stratégie, sous tutelle américaine depuis la chute des talibans, étant alors davantage focalisée sur l'angle militaire que sur le développement. L'administration Obama semble désireuse d'inverser cette image. "Notre incapacité à changer de stratégie a permis aux insurgés de reprendre des forces, a expliqué Mme Clinton. L'avenir de l'Afghanistan dépend des Afghans, de l'aide civile et militaire."

Seules les réserves exprimées par le représentant iranien sur l'envoi "inefficace" de renforts en Afghanistan sont venues troubler l'engagement politique fort exprimé par la communauté internationale pour sortir de la spirale de l'échec en Afghanistan.
Jacques Follorou


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mercredi 1 avril 2009

Rencontre américano-iranienne en marge de la conférence sur l'Afghanistan

Entre l'Iran et les Etats-Unis, ce n'est pas encore le dégel, mais c'est un premier pas. Après 30 ans de brouille et de tension, deux diplomates de haut rang, l'Américain Richard Holbrooke et l'Iranien Mehdi Akhundzadeh, se sont rencontrés mardi à La Haye en marge d'une conférence internationale sur l'Afghanistan.

Le face-à-face a été bref mais "cordial" entre l'émissaire américain pour l'Afghanistan et le Pakistan et le vice-ministre iranien des Affaires étrangères, mais c'est un nouveau signe du changement de ton et d'attitude qui caractérise les relations entre ces deux pays depuis l'arrivée à la Maison Blanche de Barack Obama.

Publiquement, la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton, qui représentait Washington à cette conférence, a minimisé la signification de cette rencontre entre son émissaire et celui de son homologue iranien. La rencontre "n'a porté sur rien de substantiel. Elle était cordiale, non prévue et ils ont décidé de rester en contact", a expliqué aux journalistes la chef de la diplomatie américaine.

Pour autant, ce face-à-face a été observé de près pour savoir si Washington et Téhéran pouvaient à nouveau travailler ensemble sur un sujet d'intérêt commun -en l'occurrence, l'Afghanistan-, trente ans après la Révolution islamique de 1979 et la rupture des relations diplomatiques bilatérales. Les deux pays ont certes coopéré en 2001 et 2002 lors du renversement du régime taliban par une coalition internationale dirigée par les Etats-Unis. Mais ce début de dialogue a été à nouveau rompu lorsque l'administration Bush a inclus l'Iran dans son "axe du mal", même si les prédécesseurs de Hillary Clinton, Colin Powell et Condoleezza Rice ont eu des contacts informels avec des ministres iraniens des Affaires étrangères.

Autre signe inhabituel de l'ouverture d'un canal diplomatique direct entre les deux pays, Mme Clinton a révélé que sa délégation avait remis en main propre une lettre à la délégation iranienne lors de cette même conférence. La missive américaine sollicite l'aide de Téhéran pour régler la question de trois ressortissants américains, détenus ou portés disparus en Iran, et souligne que leur retour au pays serait interprété comme un geste humanitaire.

La situation de ces trois citoyens américains -Robert Levinson, Roxana Saberi, Esha Momeni- était déjà connue, tout comme la position de Washington à leur sujet. Ce qui est nouveau, c'est le choix de l'administration Obama d'approcher directement l'Iran, sans passer par un intermédiaire.

Cette conférence se tenait aux Pays-Bas quelques jours après l'annonce par le président Barack Obama de la nouvelle stratégie américaine pour l'Afghanistan et de l'envoi de 17.000 soldats supplémentaires, de 4.000 formateurs militaires pour les forces de sécurité afghanes et de centaines de civils chargés d'aider à la mise en oeuvre de la politique de développement dans ce pays.

Dans leur discours, Mme Clinton et le président afghan Hamid Karzaï ont tendu la main aux talibans "repentis", ceux qui accepteraient de renoncer à la violence et de rompre leurs liens avec al-Qaïda. Les Etats-Unis tentent ainsi de suivre une voie qui s'est révélée fructueuse en Irak où d'anciens insurgés ont rejoint les forces gouvernementales et américaines.

Les talibans "devraient se voir proposer une forme honorable de réconciliation et de réintégration au sein d'une société pacifique s'ils sont prêts à renoncer à la violence, à rompre avec al-Qaïda et à soutenir la Constitution", a déclaré Mme Clinton.

La secrétaire d'Etat américaine a estimé que les combattants talibans s'étaient alliées aux forces anti-gouvernementales davantage "par désespoir" que par engagement véritable dans un pays où peu d'actions sont menées pour lutter contre la pauvreté et encourager le développement.

Dans leur déclaration finale, les participants de la conférence promettent de promouvoir la bonne gouvernance et d'institutions plus solides en Afghanistan, tout en favorisant la croissance économique et renforçant la sécurité.


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A Herat, dans l'ouest afghan, Iraniens et Américains rivalisent d'influence

Reportage:
Piles de cartons de friandises, aux couleurs fruitées, bureau acajou surmonté d'un ordinateur : le magasin de Shah Massoud Hakimi est un endroit un brin baroque. "Les sucreries vont bientôt être envoyées en Iran", sourit l'homme d'affaires à la barbe poivre et sel. Dehors, la rue grouille de véhicules pétaradants.

Dans ce quartier commerçant de Herat, la principale ville de l'Ouest afghan, non loin de la frontière avec l'Iran, l'économie tourne, indifférente à une "guerre" plutôt lointaine qui concerne au premier chef les provinces de l'est et du sud du pays.

A côté des stocks de bonbons de Shah Massoud Hakimi, Mohamad Rafi vend des motos. Il importe les pièces détachées (moteurs de Chine, selles et roues) d'Iran et les assemble à Herat.

Mèche gominée et veste de jean, Mohamad Rafi est un jeune homme pressé. Il se partage entre la faculté d'économie et le monde des affaires où il excelle déjà. "Mes profits augmentent de 10 % à 20 % par an", se réjouit-il.

Friandises made in Afghanistan exportées en Iran, pièces détachées made in Iran importées en Afghanistan : la promenade au coeur du bazar d'Herat dit mieux qu'un catalogue de statistiques l'étroitesse des liens entre cette région occidentale de l'Afghanistan et l'Iran. L'histoire pèse ici de tout son poids. Herat fut jadis intégrée à intervalles réguliers dans les empires perses.

Téhéran a longtemps revendiqué cette cité stratégique, sur les routes commerciales reliant Moyen-Orient et sous-continent indien, jusqu'à ce que Londres fasse barrage à ses ambitions quand les impératifs du "Grand Jeu" imposèrent au XIXe siècle d'ériger l'Afghanistan en Etat tampon face à la Russie. L'annexion politique a échoué, mais l'influence culturelle reste déterminante, surtout par le biais de la langue - le farsi - parlé par la population locale. Entre 1981 et 2001, les trois millions de réfugiés afghans en Iran, fuyant l'occupation soviétique, la guerre civile puis le règne des talibans, ont ravivé cette intimité ancestrale. Le vendeur de bonbons Shah Massoud Hakimi en parle avec nostalgie. "L'argent des réfugiés en Iran était une source financière importante pour Herat." Paradoxe de la paix revenue : le retour au pays des exilés a tari la manne.

Mais un autre flux est en train de se dessiner. Plus politique, davantage chargé d'arrière-pensées. Téhéran, soucieux d'enraciner son influence dans cette région frontalière, participe activement à la "reconstruction" de l'Afghanistan post-taliban. La route reliant le poste-frontière d'Islam Qala et Herat a été construite avec des fonds iraniens. De même, Téhéran finance une ligne de chemin de fer (125 km) qui assurera la liaison entre la ville iranienne de Khaf et Herat. Tout aussi stratégique, environ un tiers de l'électricité consommée par Herat est livré par les Iraniens.

"Les Iraniens s'activent beaucoup à Herat, ils considèrent que cette région représente pour eux un enjeu de sécurité nationale", décode Rafiq Shahih, professeur à l'université d'Herat. Selon des sources locales, le consulat iranien d'Herat est fort d'un contingent d'une quarantaine de diplomates, pas seulement mobilisés sur les projets de développement.

La minorité chiite fait l'objet de toute leur sollicitude. Lors des fêtes religieuses, le consul s'affiche à la mosquée Sadiqiya, restaurée grâce à des fonds iraniens. La revue de la mosquée, Payamsadiq ("Message de Sadiq"), ainsi qu'un magazine pour enfants, Shogofaha ("Fleurs de l'enfance"), sont notoirement financés par le consulat. Librairies et madrasas sont également choyées. "Les Iraniens sont là pour contrer l'influence américaine", explique Rafiq Shahih. Américains et forces de l'OTAN ont établi trois bases dans la province d'Herat. "Les Iraniens s'en inquiètent, précise M. Shahih. Ils peuvent craindre qu'elles ne soient utilisées en cas de crise ou de conflit avec Washington."

La suspicion est réciproque. Les Américains surveillent aussi l'activisme iranien dans la région. Selon les observateurs locaux, cette obsession d'endiguer le jeu de Téhéran est la clé du raidissement centralisateur de Kaboul ces dernières années vis-à-vis de Herat.

Un minipsychodrame avait éclaté en 2004 quand l'homme fort du cru, Ismaël Khan, a été rappelé à Kaboul. Issu de la communauté tadjike - majoritaire dans la province - Ismaël Khan était l'archétype du seigneur de la guerre, fer de lance des combats contre les talibans avant d'être nommé, après 2001, gouverneur local. Féodal à poigne, mû par un conservatisme religieux qui avait froissé des Heratis de culture plutôt libérale, il s'était néanmoins taillé une solide popularité en développant l'économie locale.

Alors que la reconstruction s'enlisait partout ailleurs en Afghanistan, Herat brillait avec insolence. Fort de son "modèle", Ismaël Khan cultivait un autonomisme qui a fini par exaspérer Kaboul. Sous l'évidente pression américaine, le président Hamid Karzaï a fini par le déloger de son fief. "Les Américains ont pu penser qu'Ismaël Khan était tombé sous l'influence de l'Iran", analyse M. Shahih. La coupable connexion n'a jamais été franchement établie, mais il ne fallait prendre aucun risque : Herat ne doit pas basculer de l'autre côté de la frontière.

Frédéric Bobin




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Afghanistan : l'Iran donne des gages à Obama

A l'occasion de la conférence internationale sur la situation afghane à La Haye, Téhéran a promis d'appuyer le virage américain dans la région, et Washington renoué le contact diplomatique avec l'Iran.

Il reste timide, mais entre Washington et Téhéran c'est un vrai dégel : l'Iran a apporté mardi un soutien politique mesuré à la stratégie afghane du président Obama et promis d'appuyer le virage des États-Unis vers des plans moins exclusivement militaires.

«L'envoi de troupes étrangères n'a rien amélioré en Afghanistan et il paraît probable qu'un engagement militaire accru sera lui aussi inefficace», a prévenu Medhi Akhundzadeh, chef adjoint de la diplomatie iranienne lors d'une conférence internationale à La Haye. Mais sous le regard de la secrétaire d'État américaine Hillary Clinton, il s'est empressé d'ajouter : «L'Iran est tout à fait prêt à participer à des projets visant (…) à développer et à reconstruire le pays.»

Points de convergence

Sous l'égide de l'ONU, la conférence de La Haye voulait mobiliser l'assistance internationale en faveur d'un pays plongé dans le chaos au bout de sept ans d'occupation occidentale. Quatre jours après que la Maison-Blanche eut décidé de corriger le tir en Afghanistan et dans la région, c'était surtout un test de crédibilité pour Barack Obama. Téhéran, invité avec l'accord express de Washington, a posé mardi ses cartes sur la table et permis l'ouverture.

L'Iran partage une frontière de près de 1 000 km avec l'Afghanistan. Il ne peut se réjouir de voir le contingent militaire américain déployé chez son voisin passer brutalement de 38 000 à 60 000 hommes, comme l'a décidé Washington. Mais sur beaucoup d'autres points, les prescriptions afghanes de Medhi Akhundzadeh semblaient tirées tout droit du catalogue Obama.

Le diplomate iranien, expert de l'Asie centrale, a insisté sur la nécessité d'associer les voisins de l'Afghanistan à la recherche d'une solution politique. La République islamique bien sûr, mais aussi le Pakistan. Comme Washington et ses alliés, Téhéran veut «afghaniser» la police et l'armée, combattre efficacement le trafic de drogue, relancer l'agriculture traditionnelle et reconstruire les infrastructures.

Hillary Clinton a jugé «prometteuse» l'intervention du diplomate iranien. Sans citer Téhéran, elle a aussi affirmé que la conférence de La Haye a atteint tous les objectifs recherchés par les États-Unis et du même coup garanti «la coopération de chacun des pays représentés». Dans l'après-midi, Richard Holbrooke, émissaire de la Maison-Blanche pour l'Afghanistan et le Pakistan, a brièvement rencontré le chef de la délégation iranienne et promis de «garder le contact» avec Medhi Akhundzadeh.

L'Iran, majoritairement chiite, s'était déjà rapproché des États-Unis en 2001 après que les troupes américaines et occidentales eurent chassé les talibans, sunnites, du pouvoir à Kaboul. Mais cette éclaircie avait tourné court. Quelques semaines plus tard, le président George W. Bush avait inscrit la République islamique sur son «axe du mal», aux côtés de l'Irak et de la Corée du Nord. Il avait du coup refermé la ligne que Barack Obama veut aujourd'hui rouvrir.


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