mardi 20 mai 2008

Téhéran décapite la direction baha'ie

Les persécutions ont repris contre cette minorité religieuse pacifique.

L'ARRESTATION sans motif, mardi, de six dirigeants de la communauté baha'ie, vient de susciter un profond émoi parmi les membres de cette minorité religieuse régulièrement persécutée en Iran. « Depuis l'arrivée au pouvoir de Mahmoud Ahmadinejad (juin 2005), on assiste à un durcissement. Il y a deux ans, une cinquantaine de jeunes Baha'is avaient déjà été arrêtés. Mais là, c'est la première fois que ce sont des coordinateurs importants de la communauté qui sont touchés en bloc », indique au Figaro Diane Ala'i, représentante de la communauté baha'ie auprès des Nations unies, à Genève.

Depuis la révolution islamique de 1979, le culte baha'ie, né en Iran au XIXe siècle, est proscrit. À l'inverse des autres minorités religieuses (chrétiens, zoroastriens, juifs) du pays, la petite communauté ne dispose d'aucun représentant au Parlement iranien. Au début des années 1980, les neufs membres de l'assemblée spirituelle baha'ie disparurent sans laisser de trace. L'année suivante, huit des neufs nouveaux membres furent exécutés. À l'époque, la répression finit par pousser la communauté à s'organiser dans la plus grande discrétion, et à créer un groupe d'amis, chargé de gérer les affaires de la communauté de manière informelle. C'est de ce groupe que faisaient partie les six personnes arrêtées, Behrouz Tavakkoli, Saeid Rezaie, Fariba Kamalabadi, Vahid Tizfahm, Jamaloddin Khanjani et Afif Naeim. Le septième membre du groupe, Mme Mahvash Sabet, était déjà emprisonné depuis le 5 mars.

Incitation à la haine

« Ce qui vient d'arriver ne peut que nous alarmer et nous rappeler les années noires », confie Diane Ala'i. C'est après des perquisitions poussées pendant cinq heures à leur domicile, hors de toute procédure légale, que les six personnalités baha'ies ont été arrêtées et conduites à la prison d'Evin à Téhéran. Pour l'heure, aucun chef d'accusation ne leur a été notifié. On ne sait rien de leurs conditions de leur détention. Seule Mahvash Sabet a pu être montrée, de loin, à un membre de sa famille, qui s'inquiétait de sa survie.

« Cette détention sans accusation de l'intégralité du leadership baha'i est révélatrice d'une tendance à la persécution violente et illégale des Baha'is d'Iran », déplore, dans un communiqué, l'organisation de défense des droits de l'homme Human Rights Watch. Depuis août 2004, plus de 200 membres de la minorité ont été emprisonnés et détenus sur des périodes plus ou moins longues. L'atteinte à la sécurité de l'État fait partie des accusations les plus couramment avancées. « On assiste, par ailleurs, à un accroissement de l'incitation à la haine contre les Baha'is, professée par voix de presse officielle ou dans les mosquées », relève Diane Ala'i. Ainsi, dans les journaux conservateurs, les Baha'is sont souvent dépeints comme des « ennemis de l'islam » et des « mercenaires des États-Unis ». En dépit de mesures de clémence annoncées, il y a quelques années, par les instances universitaires, les procédures d'accès aux études supérieures restent limitées pour les étudiants baha'is qui se voient souvent dire que leur dossier d'examen est « incomplet ».


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