dimanche 8 mars 2009

Premier signe d'ouverture de l'équipe Obama en direction de l'Iran

Avec la proposition américaine présentée, jeudi 5 mars à Bruxelles, par Hillary Clinton d'une conférence internationale sur l'Afghanistan, à laquelle l'Iran serait invité, un nouveau signe de décrispation a été donné par l'administration Obama. Même si l'idée d'associer Téhéran aux discussions sur l'Afghanistan est agitée depuis des mois à Washington, l'invitation à la réunion du 31 mars est la première ouverture concrète.

Une fois les contacts engagés, comment amener Téhéran à renoncer à son programme nucléaire ? La commission des affaires étrangères du Sénat, présidée par le démocrate John Kerry, a tenu trois journées d'auditions sur la question. Elle a entendu, jeudi, les deux doyens de la diplomatie américaine, Zbigniew Brzezinski et Brent Scowcroft, l'un démocrate, l'autre républicain.

D'entrée, M. Bzrezinski a fixé les termes de l'alternative pour Barack Obama. Soit le but des négociations est d'"encourager les Iraniens à être intransigeants", afin de les rendre responsables de l'échec, auquel cas il suffit de les menacer de sanctions renforcées, d'exiger des préconditions, de répéter que l'option militaire reste valable, et de les accuser d'encourager le terrorisme. Soit des négociations "sérieuses" s'engagent afin de "créer les conditions pour que l'élite iranienne considère qu'il est dans son intérêt d'aller vers la modération".

Pour l'ancien conseiller à la sécurité nationale de Jimmy Carter, les Iraniens ont laissé des "ambiguïtés" qu'il est peut-être possible d'exploiter. "Ils n'avancent pas à toute allure sur le programme nucléaire" par exemple. Le régime islamique vise, selon lui, le modèle japonais de quasi-Etat nucléaire : il ne veut pas forcément se doter de la bombe, au contraire des Coréens du Nord. C'est pourquoi il n'est pas partisan d'imposer une date butoir aux négociations, du moins "pas publiquement".

UNE DÉCISION CONTROVERSÉE


Selon les experts, poser des conditions préalables, comme l'ont fait les Européens avec la suspension de l'enrichissement est improductif. Les négociations devraient être multilatérales sur le nucléaire ("un problème qui n'est pas seulement américain"), bilatérales sur les autres dossiers, comme l'Irak. "Ce n'est pas parce que nous ne sommes pas d'accord sur le Hamas que nous devons exclure de coopérer sur l'Afghanistan", a dit Richard Haass, le président du Council on Foreign Relations.

Brent Scowcroft, ex-conseiller à la sécurité nationale, sous Gerald Ford et George Bush père, a relevé les contradictions de l'administration précédente : "Nous déclarons qu'un Iran nucléaire est inacceptable. Et nous mettons en œuvre un bouclier anti-missile pour s'y préparer !"Son alter ego a déploré que le mot de "terrrorisme" soit employé à tort et à travers: "Quand la Corée du Nord coopère sur le plutonium, on la retire de la liste des sponsors du terrorisme. Quel rapport ?"

La crise économique a perturbé les calculs. Les positions des pays producteurs d'hydrocarbures (Iran, Russie,) sont moins favorables mais les Européens seront peut-être encore plus réticents à imposer des sanctions lourdes, sauf à bénéficier de compensations, de même que la Chine, dépendante du pétrole iranien.

Comment commencer ? Le républicain engagerait le dialogue secrètement : discuter avec les Américains reste une décision "controversée" en Iran.Le démocrate a appris à ses dépens que le secret pouvait "être exploité pour nous mettre dans une position embarrassante". Il pense que le dialogue doit s'engager rapidement, "à bas niveau" s'il le faut, mais avant l'élection présidentielle iranienne de juin : pour ne pas laisser à Mahmoud Ahmadinejad la possibilité de prétendre que "les Etats-Unis attendent sa défaite pour négocier".

Corine Lesnes


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