mardi 10 février 2009

En Iran, l'ancien réformateur Mohammad Khatami se présentera à la présidentielle

Après des semaines de tergiversations, l'ancien président iranien, le réformateur Mohammad Khatami, a finalement déclaré, dimanche 8 février, qu'il se présenterait à l'élection présidentielle du 12 juin. "J'annonce fermement ma candidature", a-t-il dit au cours d'une conférence de presse à Téhéran, en insistant pour que les élections soient "libres" et la participation "enthousiaste". Ce qui était une claire allusion aux fraudes dénoncées par plusieurs candidats réformateurs lors de la présidentielle de 2005 qui avaient porté le fondamentaliste Mahmoud Ahmadinejad au pouvoir.

Président de 1997 à 2005, M. Khatami, un religieux tolérant et fin lettré de 65 ans, avait suscité bien des espoirs par son ouverture auprès des jeunes, des femmes, de la presse et de la société civile en général. Ce qui lui avait valu force critiques chez les conservateurs qui lui ont surtout reproché sa politique de "détente" et sa "mollesse" face aux Occidentaux, notamment sur le dossier nucléaire.

Mais son incapacité à mener à terme des réformes avait montré ses hésitations et sans doute aussi les "limites" du pouvoir du président dans un système en double commande où les organes religieux et le "guide" suprême ont le dernier mot. Le "guide", l'ayatollah Khamenei, était hostile aux réformes de M. Khatami. Qu'en sera-t-il cette fois, au moment où certains dirigeants iraniens cherchent un moyen de saisir sans déchoir la main tendue de Barack Obama à Washington ? Le "guide" a reçu M. Khatami, il y a trois semaines. Selon les confidences que nous a faites un de ses proches : "Il ne lui a pas opposé un feu rouge ni accordé un feu vert, mais l'a laissé méditer sur un feu orange..."

TOUTES LES CARTES EN MAIN

Pour l'instant, chez les réformateurs, seul l'ancien président du Parlement, un religieux modéré, Mehdi Karroubi, est entré en lice. Des sondages "informels" donnent M. Khatami gagnant en juin contre n'importe quel candidat. Côté conservateur, la candidature de M. Ahmadinejad semble acquise, même si ce dernier ne s'est pas prononcé. Un de ses conseillers ayant déclaré que sa candidature était "naturelle". De plus, le "guide" lui a montré un soutien explicite, il y a trois mois, lui suggérant d'agir, non comme s'il n'avait plus devant lui que quelques mois de mandat, mais "quatre ans...". Enfin, les religieux conservateurs ont dit appuyer sa candidature, de même - fait unique - que le chef d'état-major de l'armée, le général Hassan Firouzabadi.

Les conservateurs sont certes divisés et le groupe de fondamentalistes autour de M. Ahmadinejad ne fait pas l'unanimité en raison de sa politique économique inflationniste et de l'isolement du pays auquel il a contribué. Mais de l'avis des analystes, contre M. Khatami, les conservateurs vont serrer les rangs.

"Cette fois M. Ahmadinejad a toutes les cartes en main, la télévision, les gouverneurs de province, la presse, le parlement. La compétition va être très dure", nous confie Mehdi Karroubi. Quant à Mohammad Atrianfar, conseiller de l'ancien président Rafsandjani qui pourrait apporter un soutien "tactique" aux réformateurs, il explique : "Le noyau dur des radicaux c'est 15 % de l'électorat. Les réformateurs doivent résister, utiliser les petites opportunités qu'ils ont et surtout convaincre le "guide" que s'ils gagnent, lui n'y perdra rien."

Marie-Claude Decamps

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