vendredi 3 juillet 2009

L'Iran vu par le fils du shah Par Nicolas MOSCOVICI


De passage à Paris jeudi, le fils du shah d'Iran a évoqué devant les journalistes la crise politique qui secoue son pays depuis trois semaines. Convaincu que le mouvement de protestation contre le pouvoir entraînera à terme la chute de la République islamique installée en 1979, Reza Pahlavi, partisan d'un Iran laïc et démocratique, appelle ses concitoyens "à l'unité".

Il veut croire "au commencement de la fin". A la rencontre des médias ce jeudi à Paris, Reza Pahlavi n'a eu de cesse de marteler que le régime islamique instauré en 1979 en Iran était voué à disparaître, affaibli, selon lui, par la crise politique qui secoue le pays depuis trois semaines. Invité de l'European American Press club, le fils du dernier shah d'Iran, en exil depuis trente ans, s'est toutefois bien gardé d'annoncer une mort à bien des égards prématurée. En revanche, "son Altesse", porte-parole en Occident d'un Iran débarrassé de la théocratie, est intimement convaincue que la vague de protestation né du verdict - faussé - des urnes lors du scrutin présidentiel du 12 juin dernier "n'allait pas mourir", et ce, malgré un certain essoufflement constaté. "Un mouvement a pris naissance", a-t-il au contraire déclaré avec gravité dans l'auditorium feutré d'un hôtel de luxe parisien. "Il s'agit d'un nouveau-né qu'il faut protéger, afin qu'il devienne un homme... ou une femme."

La menace d'un "génocide"

"Bien sûr, reconnaît-il, ce mouvement connaitra des hauts et des bas", mais à terme, il doit emporter un régime qui "oppresse, réprime et humilie" ses concitoyens. Sûr de son fait, celui qui est présenté en Occident comme "le principal opposant à la République islamique" affirme que le système est déjà en train de se fissurer, de l'intérieur. S'emparant des luttes d'influence qui semblent agiter la structure étatique iranienne (*), Reza Pahlavi pointe du doigt sa perte de légitimité. "Quand un régime totalitaire cède sur quelque chose, indique-t-il en référence aux atermoiements du pouvoir au moment des premiers rassemblements de l'opposition à Téhéran, tout finit par s'écrouler". Seule inconnue dans ce scénario déroulé avec certitude, la folle extrémité d'un bain de sang dans les rues de Téhéran (à deux reprises, Reza Pahlavi a employé le terme "génocide"). "Je n'ai pas de réponse claire sur ce sujet", reconnaît-il alors qu'il se trouve "en contact permanent" avec des sources locales. Mais, suggère-t-il, "je pense que les militaires n'obéiront pas à l'ordre de tirer contre leurs frères et soeurs".

Pour l'heure, et en attendant de voir comment la situation évolue sur le terrain, le fils du shah en exil en appelle "à l'unité" de tous les opposants au régime. Conscient de l'extrême diversité du mouvement de contestation, emmené selon lui par "des centaines de leaders à travers tous le pays", Reza Pahlavi ne s'aventure pas trop loin sur le chemin de "l'après-République islamique". "Nous verrons le moment venu", déclare-t-il avec prudence. "Quand un espace de liberté sera constitué en Iran, ce sera au peuple de décider de son avenir." Bien évidemment, l'idée d'une monarchie parlementaire ne serait pas pour lui déplaire, mais, au-delà, et dans un contraste saisissant avec l'Iran d'aujourd'hui, il évoque surtout les grands principes d'un pays moderne, citant notamment la séparation de la religion et de l'Etat, l'abolition de la peine capitale, l'émancipation des femmes ou la liberté de l'orientation sexuelle des Iraniens. "L'esprit de la jeunesse de mon pays (60% des Iraniens ont moins de 35 ans, ndlr) s'accorde avec mes principes", déclare avec conviction le fils du Shah. "Nous appartenons à la même époque", ajoute l'opposant de 49 ans. Epoque qui, en Iran, n'est plus celle des ayatollahs.

(*) La rumeur prête à l'ayatollah Hashémi Rafsanjani, président de l'Assemblée des Experts, l'intention de destituer le guide suprême du pays, l'ayatollah Sayyid Ali Khamenei.


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